Publié le 20 déc 2024Lecture 7 min
L’asthme et le sport chez l’enfant - Bronchospasme induit à l’exercice et sports contre-indiqués
Fabien BEAUFILS*, Pessac
La pratique d’une activité physique a démontré son intérêt dans la prise en charge de l’asthme. Pourtant, la survenue de symptômes à l’effort, les craintes parentales ou de l’enfant et des idées reçues persistantes sont souvent à l’origine d’une limitation de l’activité physique chez l’enfant asthmatique. L’objectif de cet article est d’apporter des éléments de réponses aux questions sur la pratique du sport, fréquentes lors de l’annonce du diagnostic ou au cours du suivi de l’asthme chez l’enfant.
L'asthme concerne environ 10 % des enfants en France. Il est caractérisé par la survenue de symptômes qui peuvent être induits par de nombreux facteurs, tels que l’exposition à des allergènes ou à des irritants, un changement de temps, des infections respiratoires ou l’exercice.
Évaluation des symptômes à l’effort
L’activité physique est un stimulus important pour les symptômes de l’asthme chez de nombreux patients. L’évaluation des symptômes à l’effort et la limitation des activités sont inclus dans l’évaluation du contrôle de l’asthme et de qualité de vie(1). Elle doit ainsi être systématique et tenir compte d’éventuelles utilisations de bronchodilatateurs avant les activités physiques.
Les symptômes les plus courants chez l’enfant sont la toux, la dyspnée, la respiration sifflante, l’oppression thoracique, la limitation des performances ou l’augmentation de la fatigue, des maux d’estomac ou de gorge. Ces symptômes sont liés à la survenue d’un bronchospasme induit par l’exercice (BIE) qui se manifeste souvent après l’exercice, typiquement dans les 15 minutes, mais qui peut survenir pendant l’exercice, avec un pic au bout de 10 minutes. Le plus souvent, les symptômes disparaissent spontanément en 60 minutes environ(2).
Le bronchospasme induit à l’exercice
Le BIE est lié à l’inhalation d’air sec, responsable d’une perte d’eau compensatoire, ce qui entraîne un changement osmotique transitoire à la surface des voies respiratoires. Cela induit la libération de différents médiateurs par les mastocytes et éosinophiles à l’origine d’une bronchoconstriction, d’une inflammation des voies respiratoires, d’une stimulation des nerfs sensoriels, de la libération de neurokinine et de la production de mucus(3).
Confirmer le bronchospasme induit à l’exercice
Si les symptômes et la limitation à l’effort font suspecter un BIE et un asthme, une confirmation du diagnostic par des explorations fonctionnelles respiratoires est nécessaire (figure). On recherchera alors une amélioration significative du VEMS postbronchodilatateurs ou une hyperréactivité bronchique par test de provocation bronchique à la méthacholine ou à l’exercice(1,3). En l’absence de ces éléments, il faudra évoquer d’autres diagnostics à l’origine des symptômes à l’effort, tels que l’obésité, un manque de forme physique, des affections comorbides comme un syndrome d’hyperventilation, ou des alternatives telles que l’obstruction laryngée inductible(1,4). Si l’asthme est confirmé, la mise en place d’un traitement de fond et le contrôle de la maladie auront pour objectif de réduire la symptomatologie à l’effort(1).
Figure. Algorithme de prise en charge des symptômes à l’effort.
Comment limiter les symptômes à l’effort chez l’enfant asthmatique ?
Un bon contrôle de l’asthme obtenue par la prise régulière du traitement de fond (corticothérapie inhalée) est le meilleur moyen de limiter le risque de survenue de symptômes d’asthme à l’effort. Un échauffement progressif en accélérant petit à petit son rythme respiratoire préparera les bronches à l’activité physique et une récupération progressivement après l’effort leur permettra de se réadapter à une respiration de repos. Il faut adapter l’intensité de son activité selon sa forme physique et s’hydrater régulièrement pendant l’activité, sans attendre d’avoir soif. Il est également possible de prévenir la BIE en prenant 1 ou 2 bouffées de bronchodilatateurs (traitement de crise) au moins 10 minutes avant l’effort. Cependant, afin de pouvoir évaluer le retentissement de l’asthme sur les activités physiques, il sera utile de réaliser des séances de sport sans prise de bronchodilatateurs, en particulier si l’asthme est bien contrôlé en dehors de l’effort.
Promouvoir l’activité physique chez le patient asthmatique
Pour éviter la survenue de symptômes, de nombreux enfants dont le traitement n'est pas optimal, évitent tout exercice physique intense afin que l’asthme paraisse bien contrôlé. Cela peut conduire à une mauvaise condition physique et à un risque plus élevé d’obésité. Une étude récente a démontré une diminution des capacités maximales à l’exercice avec une consommation maximale d’oxygène (VO2 max.) moindre chez les enfants asthmatiques par rapport à des enfants non asthmatiques(5). Cette étude a aussi identifié une proportion d’enfants présentant une diminution du seuil ventilatoire anaérobie, indicateur d’un déconditionnement physique, trois fois plus élevée dans le groupe asthmatique par rapport au groupe témoin(5).
Pour limiter le déconditionnement à l’exercice dans l’asthme, il est aujourd’hui recommandé d’encourager les personnes souffrant d’asthme à pratiquer une activité physique régulière pour ses bienfaits sur la santé en général et sur l’asthme. En effet, une activité physique régulière améliore la condition physique cardiopulmonaire et peut avoir un léger effet bénéfique sur le contrôle de l’asthme, la fonction pulmonaire et la qualité de vie(1).
De plus, depuis la loi de modernisation du système de santé du 26 janvier 2016, le sport est reconnu « médicament » et des revues récentes soulignent l’intérêt d’une activité physique et du réentraînement à l’effort dans la prise en charge de la maladie asthmatique(6). En cas de limitation à l’exercice chez un patient ayant un asthme confirmé et contrôlé, la mesure de la VO2 max. et un réentraînement à l’effort peuvent être indiqués (figure).
Quels sports éviter, quels sports pratiquer ?
L’asthme n’est pas une contre-indication à la pratique sportive ni au sport de haut niveau, en dehors du cas particulier de la plongée sous-marine avec bouteilles. Certaines activités sont conseillées aux personnes asthmatiques, telles que la natation ou l’aquagym, les arts martiaux qui favorisent le contrôle de la respiration, ou encore le vélo et la marche à pied qui améliorent la capacité respiratoire. Cependant, il existe peu de preuves permettant de recommander une forme d’activité physique plutôt qu’une autre pour les personnes souffrant d’asthme. Il faut en revanche choisir une activité qui plaît et prendre en compte les conditions de l’air en évitant l’air froid, les pics de pollution et les situations d’exposition aux allergènes auxquels est sensibilisé le patient (sport lors de pics polliniques pour les patients allergiques aux pollens, équitation pour les patients allergiques aux acariens)(7).
Cas particulier de la plongée sous-marine
Depuis la publication de 2003 de la commission médicale de la Fédération française d’études et de sports sous-marins (FFESSM), l’asthme est devenu une contre-indication relative à la pratique de la plongée sous-marine. Les recommandations de 2014 de la FFESSM indiquent une non-contre-indication à la plongée si le patient a un asthme bénin, ou parfaitement contrôlé sous traitement, et sans antécédents de crises modérées à graves et/ou brusques, spontanément ou sous l’influence d’un facteur déclenchant, tels que l’effort ou le froid, incluant les conditions de plongée, et une spirométrie (courbe débit volume simple) normale, avec à l’état stable. Elles indiquent aussi qu’il faut renoncer à la plongée en période d’instabilité symptomatique de l’asthme, et attendre au moins 48 heures, et jusqu’à 7 jours si nécessaire, après une crise d’intensité modérée(8).
Faut-il réaliser un bilan avant la pratique sportive ?
Les enfants asthmatiques ne nécessitent pas de bilan particulier avant la reprise ou l’intensification des activités physi ques ou sportives, sauf en cas d’asthme difficile ou sévère (paliers 4 et 5 du GINA(1)), d’asthme non contrôlé et d’antécédent d’asthme aigu grave. Dans ces derniers cas, une évaluation médicale est nécessaire pour évaluer le contrôle de l’asthme et, en cas d’asthme non contrôlé, ajuster le traitement pour permettre la pratique du sport.
Conclusion
L’asthme et le sport ne doivent pas s’éviter mais s’associer. L’asthme ne contre-indique pas la pratique sportive qui est, au contraire, à encourager. II est important de respecter quelques règles simples pour limiter le risque de survenue de symptômes à l’effort. En cas de symptômes à l’effort, il faut discerner la part liée à l’asthme et celle liée à d’autres comorbidités éventuelles.
* Université de Bordeaux, Centre de recherche cardiothoracique de Bordeaux, Inserm U1045, Bordeaux Imaging Center, Pessac CHU de Bordeaux, Département de pédiatrie, CIC-P 1401, Service d’anatomopathologie, Service d’exploration fonctionnelle respiratoire, Bordeaux Inserm, Centre de recherche cardiothoracique de Bordeaux, U1045, Centre d’investigation clinique (CIC-P 1401), Pessac
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