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Néonatologie

Publié le 24 mar 2025Lecture 6 min

Suivi des enfants nés prématurés : un enjeu crucial pour le développement - Rôle du médecin traitant dans la prise en charge des anciens prématurés

Nellie HOUETO, Hyères, Responsable du groupe néonatologie de l’AFPA

Les enfants nés prématurés représentent une population vulnérable, nécessitant une attention particulière pour détecter et prévenir les troubles du neurodéveloppement. Le médecin traitant, pédiatre ou médecin généraliste, joue un rôle central dans le suivi et l’orientation de ces enfants pour optimiser leur croissance et leur développement global.

Les réseaux de suivi des enfants vulnérables   Les réseaux ville-hôpital regroupent des professionnels tels que pédiatres, médecins généralistes, professionnels de PMI et du CAMSP. Les objectifs principaux de ces réseaux sont le repérage précoce des troubles du neurodéveloppement via des consultations ciblées de 0 à 7 ans, la mise en place d’un accès précoce à des soins adaptés (orthophonie, kinésithérapie, ergothérapie, psychomotricité, etc.), et un soutien psychologique et social aux familles. Ces réseaux favorisent une coordination et un suivi optimaux grâce à des outils standardisés comme des logiciels communs et des dossiers de suivi.   Plasticité cérébrale et prise en charge précoce   Le cerveau des enfants prématurés, hautement adaptatif, bénéficie d’une stimulation précoce : – période sensorimotrice sensible : 0 à 2 ans ; – fonctions langagières et exécutives : 2 à 8 ans. Une prise en charge adaptée pendant ces fenêtres de plasticité cérébrale améliore considérablement les trajectoires développementales. Il faut souligner l’importance des interactions parents-enfant pour stimuler les capacités cérébrales. Le repérage des signes précurseurs de troubles neurodéveloppementaux est primordial pour intervenir rapidement.   En pratique : ce que le médecin traitant ne doit pas manquer   Suivi de la croissance et de l’alimentation • Rechercher des troubles de l’oralité : lenteur à la succion, refus alimentaire, difficultés avec les morceaux, troubles de la déglutition, refus du biberon ou de la cuillère, bavage excessif, absence de signaux de faim, réflexe nauséeux et vomissements, etc. ; • suivi rapproché et individualisé de la croissance en postnéonatologie, avec modalités d’alimentation individualisées, selon les recommandations de l’ESPGHAN (European Society for Paediatric Gastroenterology Hepatology and Nutrition) (tableau 1)(1) ; • il existe beaucoup de laits infantiles sur le marché et le détail de leur composition n’est pas toujours bien connu.   Le site de l’Association de formation professionnelle en pédiatrie (Afpa), www.laits.fr, est utile pour le choix de la formule infantile adaptée. La diversification est à débuter autour de 4 mois d’âge corrigé (AC), en privilégiant les matières grasses crues. La prise en charge des troubles de l’oralité doit être précoce : orthophonie, kinésithérapie, psychomotricité, etc. Les courbes staturopondérales et d’indice de masse corporelle (IMC) doivent être tracées systématiquement. Un avis endocrinopédiatrique est requis en cas d’absence de rattrapage (persistance d’une taille < -3 DS à 4 ans). Dépister la maladie rénale chronique (MRC) et l’hypertension artérielle (HTA) La maladie rénale chronique chez l’ancien prématuré s’explique par une oligonéphronie, une altération qualitative de la formation des néphrons et une diminution du volume rénal(4). Suivi de la fonction rénale en pratique pour tous les anciens prématurés de moins de 35 SA (semaines d’aménorrhée) : – mesure annuelle de la pression artérielle à partir de 3 ans avec brassard adapté et enfant calme. Des outils numériques comme le calculateur de tension artérielle ou des abaques disponibles sur le site BCM.edu, peuvent être utiles (figure 1 et tableau 3) ; – protéinurie et rapport protéinurie/créatinurie à 6 ans, en début et en fin d’adolescence ; – conseils aux parents : éviter les AINS, maintenir un apport protéique adapté, prévenir le surpoids ; – ostéoprévention globale par des apports recommandés en vitamine D (tableau 2). Figure 1. Calculateur de la pression artérielle pédiatrique en fonction de l’âge, du sexe et de la taille, d’après le Baylor College of Medecine (https://www.bcm.edu/bodycomplab/BPappZjs/BPvAgeAPPz.html).   Traquer les troubles sensoriels • Vision Des bilans ophtalmologiques systématiques sont réalisés de 9 mois à 5 ans. Tout enfant prématuré doit bénéficier systématiquement d’un bilan ophtalmologique spécialisé avec estimation de l’acuité visuelle, mesure de la réfraction sous cycloplégie et réalisation d’un fond d’œil à 9-12 mois d’AC, 2,5 ans, 3 ans et 4-5 ans. • Audition Potentiels évoqués auditifs (PEA) avant 6 mois d’âge civil et consultations ORL avant 9 mois d’âge corrigé.   Rechercher des signes de troubles du neurodéveloppement À chaque consultation, il est primordial de repérer des troubles moteurs précoces, y compris des signes de paralysie cérébrale ou un simple décalage dans les acquisitions motrices. L’observation de la motricité spontanée est une aide précieuse dans le suivi de ces enfants. L’étude des mouvements généraux en particulier est un marqueur fiable de la survenue ultérieure d’une paralysie cérébrale. La prise en charge en soutien au développement (kinésithérapie, psychomotricité) doit être précoce pour limiter le sur-handicap via les centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP), les plateformes de coordination et d’orientation (PCO), etc.   En pratique au cabinet, les signes d’appel et d’alerte sont les suivants : Signes d’appel : – décalages des acquisitions, en corrigeant pour l’âge, du terme jusqu’à l’âge chronologique de 2 ans ; – quel que soit l’âge, toute inquiétude des parents concernant le neurodéveloppement de leur enfant doit être considérée comme un signe d’appel ; – régression ou non-progression des acquisitions. Signes d’alerte : • déviation importante de la trajectoire développementale.   Rechercher des troubles neuromoteurs mineurs Ils sont à repérer également, surtout chez les plus grands : troubles du tonus, de la marche, troubles de l’équilibre et de la coordination, instabilité posturale, troubles de la motricité fine, etc. Il faut également rechercher des troubles cognitifs spécifiques : déficiences intellectuelles globales ou des troubles du comportement.   Dépister les troubles du langage Une consultation ORL et un bilan orthophonique doivent être systématiquement demandés en cas de retard, de régression ou de stagnation du langage. Le dépistage des troubles de l’éveil et des interactions est réalisé avec des outils standardisés, questionnaire M-CHAT, grille PRÉAUT, etc.   Particularités vaccinales du prématuré Les grands prématurés (< 33 SA) ont, par rapport aux enfants nés à terme, un risque accru de faire une coqueluche, une infection invasive à Haemophilus influenzae type B (Hib) ou à pneumocoque(8). Pour les valences coqueluche, pneumocoque, Hib et hépatite B, quels que soient les critères retenus, l’immunogénicité est nettement moins bonne(8). En pratique, au cabinet : – les vaccinations sont à débuter au même âge chronologique que les enfants à terme ; – pour les moins de 33 SA, maintien d’une primovaccination par trois injections respectivement à 2, 3 et 4 mois, pour le vaccin pneumococcique conjugué mais aussi pour l’hexavalent ; – vaccin antigrippal recommandé à partir de l’âge de 6 mois si dysplasie bronchopulmonaire (DBP) ou asthme ; – vaccin rotavirus recommandé et possible dès 6 semaines d’âge chronologique ; – prophylaxie VRS selon recommandations et vaccination de l’entourage (grippe, coqueluche, etc.).   EN PRATIQUE, ON RETIENDRA   • Les enfants prématurés présentent un risque accru de troubles neurodéveloppementaux. • Le suivi coordonné et les fenêtres de plasticité cérébrale permettent d’agir précocement. Une prise en charge multidisciplinaire est essentielle pour améliorer leur pronostic à long terme. • Le rôle du médecin traitant est de coordonner un suivi adapté et précoce des enfants prématurés. Cela inclut une surveillance rapprochée des aspects sensoriels, moteurs et cognitifs, en collaboration avec les différents acteurs du réseau de soin. • L’intégration de ces réseaux de suivi et des outils standardisés proposés est un atout pour améliorer l’efficacité du suivi.

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