Pneumologie
Publié le 28 juil 2010Lecture 5 min
Faut-il changer de stratégie de traitement de l’asthme chez l’enfant ?
Les recommandations internationales préconisent, lorsque l’asthme n’est pas contrôlé avec des doses faibles de corticoïdes inhalés (CSI), d’y associer un bronchodilatateur de longue durée d’action (BDLA), et comme alternative de doubler la dose de CSI ou d’associer un antagoniste des récepteurs des leucotriènes (ALTR). Il n’existait cependant pas d’étude prospective sur une large série d’enfants comparant ces trois stratégies avec comme critère principal le contrôle de l’asthme. Les résultats de l’étude BADGER (pour Best Add-on Therapy Giving Effective Responses) publiée en mars 2010 dans le New England Journal of Medecine apportent des éléments de réponse (1).
Dans ce travail, 182 enfants âgés de 6 à 17 ans, dont l’asthme n’était pas contrôlé avec 100 μg x 2/j de fluticasone, ont été inclus pour recevoir de façon randomisée pendant trois périodes de 12 semaines soit 250 μg x 2/j de fluticasone, soit l’addition de salmétérol 50 μg x 2/j, soit l’addition d’un ALTR, le montelukast 5 ou 10 mg/j. Un score composite de trois critères a été évalué : la survenue d’exacerbations nécessitant une corticothérapie orale, le nombre de jours avec contrôle et le VEMS. Une EFR avec un test à la métacholine, une mesure du NO exhalé (eNO), un questionnaire de contrôle (ACT pour les plus de 11 ans et pédiatrique ACT de 6 à 11 ans), un questionnaire de qualité de vie étaient réalisés toutes les 4 semaines. Un traitement était considéré comme meilleur si pendant la période, la consommation de corticoïdes per os était inférieure de 180 mg, ou si le nombre annualisé de jours contrôlés était supérieur de 31 jours ou si le VEMS à la fin de la période était ³ 5 %. L’analyse a été faite en deux temps, d’une part la recherche d’une stratégie supérieure, d’autre part la recherche de facteurs prédictifs de réponse à telle ou telle stratégie. Une amélioration significative a pu être observée chez 98 % des enfants. L’adhérence, évaluée par le comptage des comprimés et le nombre de bouffées d’aérosol doseur a été excellente, supérieure à 80 %. C’est l’addition d’un BDLA qui avait la probabilité de meilleure réponse par rapport à l’addition d’un ALTR (RR : 1,6 ; p = 0,004), ou au doublement de la dose de CSI (RR : 1,7 ; p = 0,002). La probabilité que les BDLA apportent le meilleur contrôle était de 45% environ et un peu moins de 30% pour le doublement des CSI ou l’addition d’un BDLA. Seul, le score de l’ACT était prédictif d’une meilleure réponse aux BDLA (p = 0,009). Les enfants de race blanche étaient les plus susceptibles d’une meilleure réponse aux BDLA, et les enfants de race noire d’une moins bonne réponse aux ALTR (p = 0,005). En revanche, ni le seuil de positivité à la métacholine, ni le eNO, ni le sexe, une sensibilisation perannuelle, le VEMS de base, la réversibilité, le nombre de jours contrôlés, le nombre d’exacerbations récentes, n’étaient prédictifs de la réponse à une des trois stratégies. Le fait que ni le VEMS de base ni la réversibilité ne soient prédictifs de la réponse évitait le biais de sélection d’enfants répondeurs aux ALTR. L’éditorial signé par Erica von Mutius prend à mon sens à contre-pied les conclusions de l’article (2). Arguant du risque d’exacerbations sévères voire de décès avec les BDLA, E. von Mutius suggère qu’en cas de non-contrôle avec des faibles doses de CSI, la priorité devrait être donnée à l’augmentation des CSI ou à l’addition d’un ALTR. Cette attitude vis-à-vis des CSI est surprenante, car les posologies utilisées dans cette étude sont élevées (500 μg/j de fluticasone soit 1 000 μg d’équivalent béclométasone). D’autre part, il ne faut certainement pas porter systématiquement l’anathème sur les BDLA. Certaines règles, qui ont été à nouveau proposées par la FDA, doivent être respectées (3) : – pas de BDLA en monothérapie ; – éviter dans la mesure du possible les associations fixes d’emblée ; – arrêter les BDLA lorsque l’asthme est contrôlé par une association fixe comportant une dose faible à modérée de CSI; – préférer les associations fixes qui améliorent l’observance, en particulier chez l’enfant. En ce qui concerne les ALTR, cette étude atténue les résultats de l’étude PACT qui avait montré la supériorité des CSI et des associations fixes sur les ALTR, mais dans des populations pédiatriques différentes puisqu’il s’agissait d’enfants asthmatiques ayant un asthme léger à modéré non traité (4). Dans cette étude une analyse post hoc n’avait pas montré de caractéristiques phénotypiques d’une meilleure réponse aux CSI ou aux ALTR, mais suggérait que l’existence d’une atopie parentale, un eNO élevé, une hyperréactvité bronchique importante était en faveur des CSI comme premier niveau thérapeutique. Les résultats de l’étude BADGER montrent bien que si l’addition des bronchodilatateurs de longue durée d’action apporte la meilleure réponse, de nombreux enfants sont plus améliorés par l’une ou l’autre des deux autres stratégies soulignant une fois de plus la nécessité de réévaluer régulièrement le contrôle de l’asthme pour optimiser la stratégie thérapeutique. Il n’y a pas lieu de changer les recommandations proposées récemment (5).
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