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ORL et Stomatologie

Publié le 07 avr 2008Lecture 6 min

Dépistage auditif néonatal systématique. Des progrès à faire !

Y. LEROSEY, Evreux
La surdité néonatale est une pathologie fréquente pour laquelle la prise en charge précoce permet la transformation du pronostic. Cette prise en charge précoce n’est possible qu’en cas de dépistage systématique en maternité. Ce dépistage est réalisé à l’aide de tests automatisés, rapides, fiables et indolores. Seuls quelques départements le réalisent actuellement, mais il devrait être généralisé en France, dans les prochaines années.
La surdité néonatale La surdité néonatale présente une prévalence de 1 à 3/1 000 naissances. Elle est plus élevée que la prévalence des autres pathologies infantiles dépistées en France (hypothyroïdie 25/100 000, phénylcétonurie 7/100 000, mucoviscidose 50/100 000). Cependant, il n’y a pas de dépistage auditif néonatal universel en France. Quelques départements ont toutefois pris l’initiative de le réaliser. La surdité pourrait cependant justifier un dépistage néonatal universel selon les critères de l'Organisation mondiale de la santé. • Elle empêche l'acquisition du langage (surdimutité), a un retentissement sur le développement cognitif, l'apprentissage scolaire et l’intégration sociale. Elle présente un stade latent, reconnaissable. C'est durant cette phase de latence que se met en place l'acquisition normale du langage. Par la suite, la plasticité cérébrale et les capacités d'apprentissage diminuent. La perception auditive durant les 6 premiers mois de vie permet le développement ultérieur du langage. L’appareillage précoce est donc essentiel. Mais l'âge moyen de diagnostic d'une surdité profonde ou sévère, en l'absence de dépistage systématique, est respectivement de 16 et 23 mois, alors qu’il n’est que de 3 mois en cas de dépistage généralisé. La perception auditive durant  les 6 premiers mois de vie permet le développement ultérieur du langage. • Elle présente un traitement efficace : la rééducation précoce, la prise en charge orthophonique, les prothèses auditives, les implants cochléaires. Le dépistage auditif néonatal diminue l'âge moyen d'appareillage : entre 18 et 24 mois en l’absence de dépistage, contre 3 à 6 mois en cas de dépistage généralisé. La supériorité d'une prise en charge précoce avant l'âge de 6 mois comparativement à une prise en charge plus tardive, a été démontrée. Ainsi, un dépistage précoce permet un diagnostic, et une prise en charge précoce plus efficace (une prise en charge très précoce, autour de 6 mois, permet de supprimer ou de diminuer de manière très importante le handicap du langage chez 70 % des enfants). Les tests de dépistage Les tests de dépistage auditif systématiques conseillés les plus souvent réalisés sont les otoémissions acoustiques provoquées et les potentiels évoqués auditifs automatisés. Tous deux dépistent les surdités supérieures à 35 dB.   Les deux appareils pour OEAP et peaa. Les otoémissions acoustiques provoquées (OEAP) Les OEAP sont des sons générés par les cellules ciliées externes de l’organe de Corti en réponse à des stimulations sonores (clics).   Principe Les OEAP testent l’oreille moyenne et l’oreille interne. Une sonde composée d’un émetteur (du clic) et d’un microphone (récepteur) est placée dans le conduit auditif externe. Le clic va être entendu par les cellules ciliées de l’oreille interne (si elles sont fonctionnelles). Ces cellules vont alors se contracter, cette contraction génère un bruit (otoémissions) qui est capté et amplifié par le récepteur. Les mesures peuvent être perturbées par la présence de débris dans le conduit auditif externe. La majorité des auteurs proposent la réalisation des OEAP après le 2e jour de vie, afin de diminuer le nombre de faux positifs liés à la présence de résidus liquidiens dans le conduit auditif externe. La présence des OEAP chez le nouveau-né testé à J0 est inférieure à 70 %, elle atteint 70 % à J1, 80 % à J2, et est supérieure à 90 % à J3.   Test par otoémissions acoustiques provoquées (OEAP). Les potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) Les PEAA mesurent les courbes électroencéphalographiques de l’audition.  Principe Ils testent l’oreille moyenne, l’oreille interne et le nerf auditif. Trois électrodes sont placées sur le scalp et recueillent les stimuli auditifs (clics) générés par des écouteurs posés sur les oreilles de l’enfant. Ces deux tests sont indolores, rapides (10 minutes pour les OEAP, et 15 minutes pour les PEAA). Ils sont d’une grande fiabilité (plus de 98 % pour les OEAP, et près de 100 % pour les PEAA). Le coût des appareils est élevé (entre 8 000 et 13 000 ?), le coût du matériel consommable est très faible pour les OEAP (moins de 1 ?/enfant), plus important pour les PEAA (7 ?/ enfant).   Test par potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA). Historique Le dépistage de la surdité néonatale est de plus en plus réalisé dans les pays européens et nord-américains. En France, seuls les dépar-tements de l’Indre-et-Loire, de l’Eure et l’ensemble des départements de la région Champagne-Ardenne ont mis en place un dépistage systématique. En 1999, l'Anaes (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation santé) publiait un rapport confirmant que ce dépistage était scientifiquement valide et estimait souhaitable de réaliser des études pilotes, adaptées aux pratiques françaises et selon la méthodologie proposée dans ce rapport. Celui-ci préconisait la recherche d’OEAP. En décembre 2002, un rapport rédigé par un groupe d'experts a été remis au président du conseil scientifique de la Cnam (Caisse nationale d'assurance maladie). Ce rapport confirmait l'intérêt d'un dépistage universel, en priorité à l'aide des potentiels évoqués auditifs automatisés, mais en proposant, pour les centres déjà équipés et ayant une grande habitude des OEAP, de conserver ce mode de dépistage. C'est suite au rapport de l'Anaes, que nous avons mis en place en septembre 1999 le dépistage dans la maternité du Centre hospitalier d'Évreux, puis généralisé celui-ci à l'ensemble des maternités de l'Eure en janvier 2003 et, enfin, mis en place en janvier 2006 dans la maternité et les services de néonatalogie du CHU de Rouen. Résultats  Dans l’Eure, sur 20 000 naissances, 99,5 % des enfants ont bénéficié de ce dépistage (0,5 % perdus de vue) et le taux de surdités prises en charge précocement a été de 1,6 pour 1 000.  Au CHU de Rouen, 2 mois après la mise en place de ce dépistage, les premières statistiques montrent un taux de couverture de la population des nouveau-nés de 99,5 %. Conclusion Le dépistage néonatal de la surdité, devrait être systématisé en France, car il s’agit d’une pathologie fréquente, pour laquelle un traitement précoce transforme le pronostic du handicap (surdimutité). Ce dépistage est fiable, rapide et simple à réaliser à l’aide d’appareils automatisés. Sa mise en place nécessite toutefois un suivi rigoureux des enfants suspects, pendant la période de confirmation diagnostique. Cette prise en charge diagnostique rapide n’est possible que par des centres spécialisés dans la surdité infantile.

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