ORL et Stomatologie
Publié le 13 mai 2020Lecture 5 min
Traitement de l’asthme : continu ou intermittent ?
Ania CARSIN, Hôpital Saint-Joseph, service de pédiatrie, Marseille
L’administration quotidienne de corticoïdes inhalés (CSI) est le traitement de fond de 1re ligne de l’asthme de l’enfant pour prévenir les exacerbations et atteindre le contrôle quotidien des symptômes. Depuis quelques années, la CSI intermittente en fonction des symptômes a été analysée pour les patients asthmatiques. En effet, dans la pratique, certains enfants ne reçoivent qu’un traitement intermittent, car l’observance n’est pas toujours optimale, les interruptions sont fréquentes, et certains médecins eux-mêmes ne prescrivent les CSI qu’en cas d’exacerbation. Cette option est-elle justifiée pour l’enfant d’âge préscolaire (< 6 ans) ?
Qu’est-ce que l’asthme ?
Le premier épisode sifflant du nourrisson, notamment avant l’âge de 1 an, est une bronchiolite aiguë ; aucun traitement inhalé n’est recommandé. Cet article concerne l’asthme du nourrisson (survenue de 3 épi sodes sifflants) et du jeune enfant (< 5-6 ans présentant des épi sodes sifflants récidivants). Il peut aussi exister des symptômes intercritiques à l’effort, la nuit, en réponse aux émotions et en dehors des exacerbations.
Actuellement, une exacerbation se définit comme des signes respiratoires qui durent plus de 24 h liés à une bronchoconstriction qui peut être déclenchée par différents facteurs (notamment virus, allergènes, irritants). Entre les exacerbations, l’enfant peut présenter des symptômes d’asthme (toux, sifflement spontanément résolutif ou sensible aux bronchodilatateurs), mais les symptômes disparaissent rapidement (< 24 h).
Quand débuter un traitement de fond ?
Chaque enfant ayant présenté une exacerbation asthmatique doit disposer de bronchodilatateurs de courte durée d’action en cas de survenue de symptômes d’asthme. Ils constituent donc le traitement d’un épisode aigu et peuvent être associés aux corticoïdes oraux selon la sévérité des signes.
Concernant le traitement de fond, il convient de le débuter dans trois cas principaux. Tout d’abord, un traitement de fond doit être prescrit lorsque l’asthme n’est pas contrôlé sur les 4 dernières semaines (l’enfant présente des symptômes notamment la nuit [toux quinteuse], à l’effort [lorsqu’il joue ou qu’il court], aux émotions [quand il rit ou qu’il pleure]). Il faut également débuter un traitement quand il existe ≥ 3 exacerbations par an (le risque de refaire des exacerbations augmente et ainsi que celui de faire une exacerbation sévère). Enfin, un traitement de fond doit être instauré si l’enfant a présenté une exacerbation asthmatique sévère (d’autant plus si une hospitalisation a été nécessaire).
Le traitement privilégié est un traitement par corticoïdes inhalés en continu par spray (aérosol doseur) + chambre d’inhalation. La chambre d’inhalation est munie d’un masque (< 3 ans) ou d’un embout buccal (à tester) à partir de 3-4 ans selon l’enfant. Un traitement par nébulisation n’a pas à être prescrit en première intention et relève le plus souvent du spécialiste.
Le traitement est prescrit pour au moins 3 mois, il doit être réévalué régulièrement, et ne jamais être arrêté sans avis médical.
Pourquoi un traitement de fond ?
Il est important de préciser aux parents le but attendu du traitement par corticoïdes inhalés (CSI). La plupart des parents souhaiteraient que grâce au traitement, leur enfant ne soit pas asthmatique plus tard. On sait actuellement que le traitement n’influe pas sur l’histoire naturelle de la maladie et n’a pas d’influence sur la persistance de l’asthme.
Le but du traitement par CSI est double. D’une part, le traitement de fond devrait permettre de contrôler l’asthme : c’est-à-dire d’empêcher la survenue de symptômes diurnes et nocturnes, une gêne dans la vie quotidienne ou un recours à des traitements de secours (tableau). D’autre part, le traitement de fond devrait prévenir la sur venue d’exacerbations, maintenir la fonction et la croissance pulmonaires les plus normales possible, et minimiser les effets indésirables des traitements (limiter la prise de corticoïdes oraux en cas de symptômes aigus).
Est-ce qu’une CSI intermittente a la même efficacité qu’une CSI en continu ?
Non, la CSI en continu est la référence. Deux études réalisées chez l’enfant d’âge préscolaire ont tenté de répondre à cette question (étude MIST(1) et étude BEST(2)). La CSI intermittente donnée au moment d’une exacerbation pourrait permettre de limiter la prise de corticoïdes oraux, mais n’a pas d’influence sur la fréquence des exacerbations ni sur les symptômes entre les exacerbations.
Doit-on intensifier le traitement pendant l’exacerbation ?
Non, le traitement par CSI ne doit pas être intensifié lors d’une exacerbation. Cette théorie reposait sur une étude qui avait montré un effet bénéfique en multipliant la dose de CSI par 4 chez l’adulte, mais aucune étude pédiatrique n’a montré son intérêt. Le traitement doit être réévalué tous les 3 mois en tenant compte des exacerbations et de l’existence ou non de symptômes entre les exacerbations.
Peut-on arrêter l’été ?
L’été, les virus respiratoires sont moins présents et les exacerbat ions as thmat iques moins fréquentes. Il est donc « tentant » d’arrêter le traitement. Le pic d’hospitalisation pour asthme survient quel que soit l’âge 15 jours-3 semaines après la rentrée scolaire en septembre. L’arrêt des CSI doit se faire en fonction du contrôle de l’asthme et de la survenue d’exacerbation. La règle étant de baisser de 25 à 50 % les doses lorsque l’asthme est contrôlé sur 3 à 6 mois, puis d’arrêter si le contrôle est assuré. L’arrêt ne doit pas être envisagé au moment d’une période à risque (printemps pour les pollens ou en fonction les virus). Si un traitement a été interrompu pour l’été alors que l’hiver précédant l’asthme n’était pas contrôlé, il faudrait probablement le reprendre au moins 3 semaines (délai d’action des corticoïdes inhalés) avant la rentrée, mais aucune étude ne l’a encore prouvé.
Conclusion
Au total, le traitement de fond de l’asthme repose sur une corticothérapie en continu en visant la dose minimale efficace, sans intensification en cas d’exacerbation, et sans arrêt l’été si l’asthme n’est pas contrôlé depuis plusieurs mois. Il n’y a pas de recommandations pour un traitement de fond par CSI intermittente.
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