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Vaccinologie

Publié le 31 mar 2023Lecture 6 min

Du nouveau dans la prévention vaccinale des infections invasives à méningocoques

C. FERRAT, Paris

L’arrivée d’un nouveau vaccin méningococcique tétravalent A, C, W et Y s’inscrit dans le double contexte d’une importante remontée des cas d’infections invasives à méningocoques, après une baisse drastique suite à la mise en place des mesures anti-Covid-19, et d’un impact significatif de cette pandémie sur un système de soins pédiatriques déjà en souffrance.

La chute de l’incidence des infections invasives à méningocoques (IIM), survenue dès le premier confinement de mars 2020, a duré tout au long des années 2020 et 2021. La situation épidémiologique a ensuite évolué avec des cas d’IIM repartis fortement à la hausse depuis octobre dernier. En 2022, le nombre de cas déclarés, tous sérogroupes confondus, a presque triplé par rapport à l’année précédente. Pour la période du 1er au 20 janvier 2023, 82 cas ont été recensés, soit près de quatre fois plus que le mois de janvier où l’incidence des IIM était la plus faible (2020). Toutes les tranches d’âge sont concernées par cette augmentation, mais la montée la plus importante est observée chez les 16-24 ans qui ont aussi le taux de portage rhinopharyngé le plus élevé. Responsable de 51 % des IIM en 2022, le sérogroupe B reste majoritaire. En plus de la montée globale des cas, des foyers d’hyperendémie d’IIM B ont été identifiés en 2022 en région Auvergne-Rhône-Alpes avec une incidence trois fois plus élevée que la moyenne nationale et, surtout, l’émergence d’une souche clonale qui n’avait jamais été observée en France, ni ailleurs dans le monde. Une épidémie clonale d’IIM B est aussi survenue dans la région Grand-Est et se poursuit. Les IIM Y représentent 24 % de l’ensemble des cas d’IIM déclarés en 2022. Le sérogroupe Y augmente en particulier chez l’adulte, y compris chez les 16-24 ans. Comme les IIM B, les IMM W (20 % des cas) augmentent dans toutes les tranches d’âge, y compris chez les moins de 1 an. Ce phénomène est d’autant plus préoccupant que le sérogroupe W est celui qui a le taux de létalité le plus élevé (27 % en 2019 ; 45 % des décès). À noter que les cas d’IIM de sérogroupes W et Y sont revenus au niveau des cas de la période prépandémique. Enfin, le sérogroupe C reste très minoritaire (3 % des cas). Il semble sous contrôle, mais le nombre de cas détectés en 2022 est plus important qu’en 2021 (8 versus 3). Les autres groupes ou non groupables sont responsables de 2 % des cas d’IIM.   Gérer le postpandémique Les mesures imposées par la pandémie ont eu un impact considérable sur la quasi-totalité des maladies infectieuses communautaires virales et bactériennes. On a d’abord constaté une baisse généralisée, puis une remontée plus ou moins précoce, plus ou moins brutale et plus ou moins intense de l’incidence de ces infections. En 2020 et 2021, la circulation de nombreux pathogènes « obligatoires », dont le méningocoque, a diminué, entraînant une réduction de leur exposition au système immunitaire. Au terme d’une réflexion sur le risque de rebond postépidémique, une équipe de pédiatres a proposé le concept de « dette immunitaire » (immunity debt ou immunity gap) selon lequel un manque d’exposition aux pathogènes pourrait diminuer l’immunité adaptative de certains enfants à des agents pathogènes spécifiques(1). La dette immunitaire doit également être considérée au nouveau de la population. Plusieurs éléments confortent la pertinence de ce concept notamment la précocité et l’intensité des épidémies de bronchiolites, de grippe A et d’infections à entérovirus qui ont suivi la levée des mesures barrières anti-Covid-19(2). La remontée brutale des infections à streptocoque A et des IIM est aussi attribuée en grande partie à la dette immunitaire. L’augmentation des prescriptions de paracétamol et des antibiotiques de première ligne pourrait en être une autre conséquence indirecte. Par ailleurs, la crise du système de soins, en particulier des soins d’urgence, a été aggravée par le Covid-19 et pourrait être durable. D’une manière générale, il faudrait indiscutablement obtenir des couvertures vaccinales élevées pour toutes les vaccinations obligatoires et recommandées. L’absence de remontée des cas de coqueluche en France témoigne de l’intérêt d’une bonne couverture vaccinale. Avec les recommandations de vaccination des femmes enceintes contre la coqueluche et des nourrissons contre les IIM B et le rotavirus, le calendrier vaccinal a été très amélioré ces dernières années. Néanmoins, dans la situation actuelle d’un système de santé devenant défaillant, il faudrait aller encore plus loin et l’élargir non seulement aux maladies fréquentes comme la varicelle, mais aussi aux maladies plus rares, mais graves comme les IIM A, C, W, Y, dont le diagnostic peut être retardé par la situation des soins non programmés.   L’arsenal vaccinal s’élargit Selon le calendrier vaccinal actuel, les nourrissons doivent être vaccinés contre les infections à méningocoque C à partir de 2 mois avec le vaccin monovalent et contre celles dues au sérogroupe B à 3, 5 et 12 mois. Pour le reste de la population, il n’existe que des recommandations particulières qui concernent le vaccin contre les IIM B et les vaccins tétravalents A, C, W et Y. Le dernier arrivé des vaccins méningococciques conjugués des groupes A, C, W et Y est le MenQuadfi® . Ce vaccin polysaccharidique conjugué à l’anatoxine tétanique comme protéine vectrice dispose d’une autorisation de mise sur le marché à partir de 12 mois(4).Il a été évalué dans 7 études pivots multicentriques randomisées contre un comparateur actif ayant inclus un total de 6 308 sujets âgés de 12 mois et plus(4). Celles-ci ont montré qu’il induit une réponse immunitaire élevée dans toutes les tranches d’âge testées, avec un profil de tolérance similaire à celui des autres vaccins méningococciques conjugués. Sa non-infériorité par rapport aux comparateurs a été démontrée pour toutes les classes d’âge et tous les sérogroupes. Sa supériorité en termes de séroprotection et de titres en anticorps bactéricides contre le sérogroupe C versus un autre vaccin conjugué tétravalent et un vaccin monovalent C a été prouvée par une étude menée chez des jeunes enfants (12-23 mois) naïfs. Il a également été montré que la réponse immunitaire après primovaccination par MenQuadfi® persiste à long terme, avec des titres en anticorps à 3 ans allant de 66,7 % à 100 % selon le sérogroupe, et qu’une dose de rappel permet d’obtenir des taux de séroprotection proches de 100 % pour tous les sérogroupes. MenQuadfi® se présente sous la forme d’une solution injectable sans reconstitution et doit être administré par voie intramusculaire(4). Sa seule contre-indication est l’hypersensibilité à l’un de ses composants ou la survenue d’une réaction d’hypersensibilité lors d’une injection antérieure de ce vaccin ou d’un vaccin contenant les mêmes composants. Chez le jeune enfant et chez l’adolescent (10-17 ans), il peut être coadministré avec d’autres vaccins(4).

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