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Vaccinologie

Publié le 14 mai 2024Lecture 8 min

Actualité en vaccinologie

Denise CARO, d’après les communications de Robert Cohen (Saint-Maur-des-Fossés) et de Marie-Aliette Dommergues (Le Chesnay)

En France, il n’y a pas eu de nouveau vaccin en 2023, mais quelques-uns ont obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) de l’EMA ou sont en attente d’une AMM de l’ANSM et/ou de prix, et devraient être disponibles prochainement. Tel est le cas de vaccins anti-pneumococciques conjugués à valences élargies, d’un vaccin antiVRS destiné aux femmes enceintes pour protéger l’enfant à naître ou d’un vaccin antigrippal par voie nasale. La nouveauté de l’année a été la sortie du nirsévimab, un anticorps monoclonal qui protège l’enfant vis-à-vis des infections à VRS les premiers mois de vie. « Le nombre très important des connexions sur le site Infovac témoigne de l’intérêt des praticiens pour l’évolution des stratégies vaccinales », a souligné Marie-Aliette Dommergues.

La prévention des infections à VRS du nourrisson bénéficie désormais de deux stratégies possibles : d’ores et déjà l’administration d’une injection d’anticorps monoclonaux spécifiques chez le nouveau-né et, dans un proche avenir, l’immunisation passive du bébé via la vaccination de sa mère au 3e trimestre de grossesse. Agréé par l’EMA (agence européenne des médicaments) en septembre 2022, le nirsévimab est un anticorps monoclonal IgG1, doté d’une demi-vie de 63 à 73 jours, capable de neutraliser le VRS-A et le VRS-B(1). Une injection de 50 mg chez le nourrisson de moins de 5 kg et de 100 mg chez celui de plus de 5 kg, permet l’immunisation passive de l’enfant avec une efficacité de 83,5 % sur les hospitalisations pour bronchiolites à VRS, et un très bon profil de tolérance(2). En Galice, région d’Espagne qui a généralisé l’injection de nirsévimab chez les nourrissons, son efficacité a été estimée à 92 % chez les nouveau-nés l’ayant reçu dès la naissance, 80 % chez ceux l’ayant eu à quelques mois en rattrapage et 100 % chez les nourrissons à risque de bronchiolite sévère(3). En France, le démarrage de l’immunisation large des nourrissons a été freiné par le succès exceptionnel de ce nouveau traitement (accepté par 80 % des parents) et les quelques difficultés d’approvisionnement qui ont suivi. « La priorité a été donnée aux maternités ; on estime qu’environ 80 % des nouveau-nés ont pu être protégés depuis septembre », a précisé M.-A. Dommergues. L’autre stratégie préventive vis-à-vis des infections chez le nourrisson repose sur l’immunisation passive de l’enfant qui bénéficie durant les premiers mois de vie des anticorps (AC) que sa mère lui a transmis in utero. Or la vaccination de la mère pendant la grossesse booste son propre taux d’AC et celui transmis au bébé. Cela est déjà proposé pour plusieurs vaccins comme la grippe, la coqueluche ou la Covid, et cela devrait l’être bientôt pour le VRS. En effet, après plusieurs années de recherche, on est parvenu à développer un vaccin fabriqué à partir d’une glycoprotéine VRS stabilisée en conformation préfusion (qui ne peut pas infecter les cellules), efficace vis-à-vis du VRS-A et VRS-B. Ce vaccin VRS-PreF (Abrysvo®) a obtenu une AMM de l’EMA en juillet 2023 et est en attente d’une recommandation dans son pays. Pratiqué chez la femme enceinte entre la 24e et 36e semaine d’aménorrhée (SA), il augmente la production d’AC IgG et leur passage transplacentaire dans le sang du fœtus. À la naissance, le taux d’AC de l’enfant est deux fois plus élevé que celui de la mère(4). L’essai MATISSE de phase 3 a montré une efficacité de 80 % sur la prévention des bronchiolites sévères et de 60 % sur les bronchiolites non sévères chez les nourrissons dès la naissance et jusqu’à l’âge de 6 mois, avec un profil de tolérance très bon chez la mère et chez l’enfant(5).   Les vaccins antipneumococciques évoluent   Avec l’introduction du 1er vaccin antipneumococcique conjugué (PCV) chez l’enfant en 2000, l’histoire des maladies à pneumocoques a radicalement changé. Le PCV7 contenait les sérotypes de pneumocoques (4, 6B, 9V, 14, 18C, 19F et 23F) à l’origine des infections invasives (IIP) les plus fréquentes (85 % des sérotypes impliqués dans les IIP aux États-Unis et 70 % en Europe)(6). « Cependant au fil du temps, l’émergence de nouveaux sérotypes responsables d’IIP a conduit à adapter la composition des vaccins », a noté Robert Cohen. Les remplacements sérotypiques ont été variables selon les pays. En France, le PCV13 a remplacé le PCV7 en 2010 avec l’ajout des sérotypes 12F et 24F(7) . Aux ÉtatsUnis, 20 ans d’utilisation des PCV chez l’enfant ont permis d’éviter 48 000 IIP, 422 000 hospitalisations pour pneumonies, 638 000 consultations pour infections pneumocoque et 6 124 000 otites moyennes aiguës (OMA)(8). L’histoire continue à s’écrire et une surveillance étroite des IIP est nécessaire pour adapter la composition des vaccins. Pour cela, on doit tenir compte du niveau de pouvoir invasif des différentes souches responsables des IIP et des sérotypes (ST) présents dans le portage. Les vaccins destinés à la protection des enfants bien portants doivent inclure les ST à pouvoir invasif élevé ou intermédiaire. En revanche, les vaccins destinés aux personnes avec des pathologies sous-jacentes privilégient les souches de portage qui continuent à circuler et qui sont susceptibles d’être responsables d’IIP dans cette population(9). Quoi qu’il en soit, l’émergence de nouveaux ST à pouvoir invasif élevé ou intermédiaire a conduit à compléter la gamme vaccinale avec des vaccins à valences élargies. Le PCV15 comprend les ST du PCV13, plus le 22F et le 33F. Le PCV20 inclut les ST du PCV15 complétés des ST 8, 10A, 11A, 12F, 15B(C). Le ST-11A à faible pouvoir invasif a été introduit dans ce vaccin en raison de sa forte résistance aux antibiotiques. « La conception du PCV21 est radicalement différente, a expliqué R. Cohen. Il n’est pas destiné à la vaccination des enfants bien portants, mais aux personnes avec des pathologies sous-jacentes. » Il n’inclut pas les ST du PCV7 et PVC10 qui ne circulent plus grâce à la vaccination large des enfants (à l’exception du ST7). En revanche, il contient, en plus des autres ST des PCV13, 15 et 20, des ST à faible pouvoir invasif responsables d’IIP chez les personnes fragiles (11A, 15(C), 9N, 15A, 16F, 17F, 20, 23A, 23B, 31 et 35B), ainsi que le 24F à pouvoir invasif élevé non présent dans les autres vaccins car il circule peu. En juillet 2023, la HAS a publié de nouvelles recommandations. Elle préconise l’intégration du vaccin PCV15 dans la stratégie vaccinale française pour la prévention des IIP, des pneumonies et des otites moyennes aiguës à pneumocoques chez les nourrissons, les enfants et les adolescents de 6 semaines à moins de 18 ans. Elle estime que les bénéfices supplémentaires conférés par l’ajout de deux sérotypes (22F et 33F responsables respectivement de 5,1 % et 1,71 % des bactériémies et 0 % et 5,88 % des méningites à pneumocoques en 2020) justifient l’utilisation de PCV15 comme alternative au vaccin PCV13. Les deux vaccins ont la même protéine de conjugaison, le même adjuvant, la même immunogénicité sur les 13 ST communs, avec une supériorité pour ST3, et la même tolérance, le même schéma en fonction de l’âge. La vaccination mixte PCV13/PCV15 vs PCV13 procure une immunogénicité comparable pour les 13 ST communs(10). « La HAS estime également qu’en attendant la disponibilité du PCV21, le PCV20 destiné à l’enfant, est recommandé chez l’adulte. Il est en attente de remboursement. Il remplacera les vaccins actuels », a souligné R. Cohen.   Quid des vaccins grippe, varicelle et méningocoques…   Vacciner les enfants contre la grippe a une double utilité : les protéger vis-à-vis de cette infection, responsable d’un nombre non négligeable d’hospitalisations chez les moins de 15 ans et réduire les épidémies de grippe dans la population générale, un effet qui apparaît lorsque la couverture vaccinale des plus jeunes est > 50 %. Autre argument en faveur de la vaccination des enfants, l’efficacité du vaccin est plus importante chez eux que chez les adultes(11). Aussi la HAS recommande-t-elle la vaccination antigrippale chez les enfants de 2 à 17 ans sans comorbidité, en privilégiant le vaccin nasal qui, malheureusement, n’est pas remboursé pour le moment(12). « Lorsqu’il est vacciné pour la première fois, l’enfant doit recevoir 2 doses de vaccin antigrippal, a précisé M.-A. Dommergues. Les années suivantes une seule dose suffira. » « Concernant la varicelle, nous disposons de deux vaccins indiqués à partir de 12 ans, a poursuivi M.-A. Dommergues. Même s’ils ne sont pas inclus dans le calendrier vaccinal officiel (et qu’ils ne sont pas remboursés), nous conseillons de vacciner les enfants à partir de 1 an. Le schéma vaccinal est de 2 doses espacées d’au moins 4 à 6 semaines selon le vaccin utilisé. » À noter que les enfants qui ont eu la varicelle avant l’âge d’1 an, ont un risque accru de zona. Pratiquer une dose unique de vaccin dans la 2e année de vie permet de réduire ce risque. Il est également possible de proposer une vaccination postexposition, qui est efficace si elle est pratiquée dans les 3 jours suivant le début de l’éruption du cas index (protection de l’ordre de 80 %). La crainte que la vaccination des enfants (si la couverture vaccinale n’est pas suffisante) augmente le risque de varicelle grave chez l’adolescent et celui de zona chez l’adulte, a pu être écartée sur l’expérience de plusieurs pays européens qui pratiquent cette vaccination(13). Autre sujet de préoccupation, les méningites à méningocoques. « En France, on a noté un rebond des méningites à méningocoques après l’épidémie de Covid et la tendance haussière persiste en 2023, notamment concernant les souches B, Y et W, a indiqué R. Cohen. C’est chez les nourrissons que l’incidence est la plus élevée, mais en nombre de cas ce sont les 11-24 ans quisont les plus touchés. Dans cette population, la vaccination avec le MenACWY est une priorité. » Le sérotype W augmente dans toutes les tranches d’âge. Et le sérotype Y progresse chez les 11-24 ans, dépassant même les niveaux préCovid. Vacciner les adolescents et adultes jeunes avec le MenACWY permet non seulement de les protéger pendant une bonne dizaine d’années, mais aussi de réduire le portage. Une couverture vaccinale élevée des 11-24 ans offre une protection individuelle et collective, avec une réduction des infections invasives à méningocoques W et Y dans tous les groupes d’âge(14). Dès lors, recommander la vaccination MenACWY des nourrissons à 12 mois ne paraît pas nécessaire sous réserve que la couverture vaccinale des adolescents soit élevée. Il semble en outre que les nourrissons vaccinés par le Bexsero® soient protégés en grande partie contre les sérotypes W, Y et C(15). « Ils le sont néanmoins moins bien qu’avec un vaccin conjugué ACYW et on n’a pas d’effet sur le portage, a noté R. Cohen. Certains pays comme l’Espagne ont décidé de vacciner les nourrissons avec le MenACWY dès 4 mois. » D’après les communications de Robert Cohen (Saint-Maur-des-Fossés) et de Marie-Aliette Dommergues (Le Chesnay) lors de la session Infovac vaccinologie des Rencontres de Pédiatrie Pratique 2024

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