Congrès
Publié le 05 déc 2022Lecture 5 min
La périnatalité dans la pluridisciplinarité
Si cela était encore nécessaire, la théorie de l’attachement, le concept des 1 000 jours ou encore le DOHaD (Developmental origins of health and disease ) ont montré combien la santé de la mère et la santé de l’enfant sont intimement liées, au moins dans les premières années de la vie, mais aussi au-delà. C’est le credo sur lequel s’est toujours appuyée la Société française de médecine périnatale (SFMP) créée en 1970, en associant pédiatres et gynécologues obstétriciens. Pédiatrie Pratique a suivi avec intérêt les 52e Journées nationales de cette société savante, qui ont eu lieu à Lille du 12 au 14 octobre dernier.
Enquête nationale périnatale 2021 : un premier suivi à 2 mois riche d’enseignements
• D’après la communication « Enquête Nationale Périnatale (ENP) 2021: Chiffres clés nationaux & Prise en charge du nouveau-né : Évolution depuis 10 ans »
L’Enquête nationale périnatale (ENP) offre une vision de la santé des femmes prises en charge en maternité et de celle de leur enfant. Pour la première fois, un suivi à 2 mois a également porté un regard sur le retour à domicile et la perception des soins reçus au cours de l’accouchement.
L ENP est régulièrement conduite en France afin d’aider l’orientation des politiques publiques dédiées. Pendant une semaine, toutes les femmes ayant donné naissance à un enfant de plus de 22 semaines d’aménorrhée (SA) et d’un poids ≥ 500 g sont invitées à répondre à un entretien réalisé par une personne référente de la maternité quel que soit le lieu d’accouchement (toutes les maternités et maisons de naissances). L’édition 2021, menée au mois de mars 2021 (au cours d’une vague Covid-19) a bénéficié de la participation de tous les établissements français (sauf 3 maternités) et a permis l’inclusion de plus de 12 000 femmes (96 % de l’effectif total). Concernant le profil des femmes, plusieurs indicateurs ont évolué favorablement en 2021, avec d’une part un taux de vaccination plus élevé contre la grippe (30,4 % vs 7,4 % en 2016, à rapporter au contexte pandémique), une baisse du nombre de femmes fumeuses au 3e trimestre (12,2 % vs 16,3 %), et une augmentation du dépistage de la trisomie 21 et de la préparation à la naissance pour les primipares, qui atteignent respectivement 90,9 % et 80,6 %.
En revanche, plusieurs résultats sont moins favorables : l’âge des femmes à l’accouchement continue d’augmenter (un quart ont plus de 34 ans, le taux de celles de plus de 40 ans s’accroît), et 14,4 % d’entre elles avaient un IMC > 30 kg/m2 avant la grossesse. Parallèlement, le diabète gestationnel – pris en charge par insuline ou régime adapté – a fortement augmenté et concernait en 2021 4,7 % et 11,4 % des femmes ayant accouché, une tendance dont l’étiologie (augmentation du dépistage ou de la prévalence) reste à analyser. Par ailleurs, malgré les recommandations actuelles, plusieurs éléments de prise en charge sont encore insuffisants, malgré leur progression : accès à l’entretien prénatal précoce (36,5 % vs 28,5 %) supplémentation par acide folique (28,3 % vs 23,2 %), dépistage du diabète (76,1 % vs 73,2 %), nombre d’échographies (la moitié ont eu au moins 6) ou accès aux conseils concernant la réduction du risque d’exposition au cytomégalovirus (CMV) (16 %).
Le taux de déclenchement a augmenté de quelques points pour atteindre 25,8 % des accouchements, avec 69,2 % d’entre eux associés à une maturation du col (vs 61,9 % en 2016). Parallèlement, ont été observées une diminution du recours à l’ocytocine (30 % soit 2 fois moins qu’en 2016) et une baisse de la rupture artificielle des membranes (33,2 % des cas). Aucune évolution particulière n’a été observée concernant le taux de césarienne (environ un quart) ou les accouchements instrumentaux (12,4 %).
Le recours aux épisiotomies a largement diminué (8 % vs 20 %), que ce soit chez les primipares ou les multipares et les modalités d’accouchement.
Concernant les nouveau-nés, les taux de prématurité, le score Apgar moyen, le pH au cordon ou le recours au transfert néonatal sont stables, tandis qu’une augmentation du recours à l’insufflation manuelle (Néopuff®) et une baisse des prélèvements bactériologiques à la naissance ont été enregistrées. Le peau-à-peau est réalisé dans 96 % des accouchements par voies basses, et 56 % après césarienne, en intégrant aussi plus souvent le coparent. L’allaitement concerne 74 % des femmes, la mise au sein étant faite dès la salle de naissance dans 69 % des cas, mais seules 56 % des mères le maintienne à la sortie de la maternité.
La mise en place du dépistage auditif a été intégré au programme national de dépistage en 2014 et a été implémenté à échelle variable sans lien avec l’accessibilité aux soins selon les régions, mais aujourd’hui le dépistage est proposé par toutes les structures, avec un taux de refus très faible (1 %).
En conséquence 1,4 % d’enfants sont suspectés d’avoir un déficit auditif, et 1 pour 1 000 a une surdité bilatérale confirmée.
Un taux préoccupant de dépression postpartum
L’enquête 2021 a pour la première fois instauré un suivi à 2 mois des femmes qui l’acceptaient (soit 7 399 d’entre elles).
Elles ont répondu à l’autoquestionnaire EPDS (Edinburgh Postpartum Depression Scale) permettant de dépister le risque de dépression du postpartum pour un score > 12 : ainsi, 16,7 % des femmes ayant participé étaient susceptibles d’être touchées, sachant que 12,6 % d’entre elles avaient un score limite (10-12). Intérrogées sur leur vécu de l’accouchement, 96 % des mères se disaient satisfaites ou très satisfaites du suivi de la grossesse et de leur prise en charge en salle de travail. Cependant, 11,7 % d’entre elles conservaient un mauvais ou un très mauvais souvenir de leur accouchement, et 7 à 12 % rapportaient avoir été l’objet parfois ou souvent de paroles ou de gestes inappropriés de la part des soignants au cours de leur parcours. Enfin, si 56,3 % des enfants étaient allaitées à la maternité, 34,4 % le restaient à 2 mois, la majeure partie des femmes ayant arrêté précocement (dans les 15 premiers jours suivant la naissance). La moitié des femmes soulignaient que le maintien de l’allaitement est compliqué. La mise en place d’un soutien pour celles qui souhaiteraient le poursuivre pourrait aider à réduire le taux d’arrêt.
Des analyses complémentaires sont désormais planifiées sur certains aspects des résultats (douleurs, suivi à 2 mois) avec un recours au Système national des données de santé (SNDS), afin de mieux connaître la prise en charge médicale des femmes au cours de la période périnatale. Des données spécifiques aux départements et régions des Outre-mer seront prochainement rapportées. Enfin, la prochaine édition du suivi à 2 mois permettra aussi de déterminer l’impact de l’allongement du congé paternité à 1 mois sur différents paramètres (allaitement, santé mentale, etc.).
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