Publié le 11 oct 2022Lecture 5 min
Méningocoques, VRS : ne pas oublier les sujets les moins à risque
Caroline GUIGNOT, Lille
Deux années de pandémie ont vu la chute du nombre d’infections invasives à méningocoques et de celles à VRS. Quelles conséquences sur l’épidémiologie et l’approche de santé publique à venir ?
Sur le plan de la santé publique, l’épidémiologie (R0 de 4,5, répartie sur la saison hivernale) et les conséquences cliniques des infections à VRS chez les nourrissons à risque (prématurité, mucoviscidose, immunodéficience, etc.) ne peuvent écarter l’attention qui doit être portée aux autres populations concernées par l’infection. Après deux années de pandémie, la dernière saison hivernale a été marquée par une épidémie plus précoce (survenue et pic épidémique anticipés de 6 semaines). L’enjeu est de taille car la sévérité de l’infection à VRS reste hautement imprévisible. Un enfant né à terme et en bonne santé peut développer une forme grave nécessitant potentiellement une hospitalisation.
Une étude nationale récente qui s’est intéressée au fardeau épidémiologique et économique que représentent les infections à VRS chez les enfants de moins de 5 ans en France, décrit parfaitement l’enjeu(1) : menée sur l’ensemble des données PMSI collectées entre 2010 et 2018, elle montre que le nombre moyen d’hospitalisations liées au VRS est de 50 878 par an, dont 69 % chez les moins de 1 an et 33 % chez les moins de 3 mois, avec une augmentation progressive de l’incidence chez ces derniers au cours de la période d’analyse. Aussi, près de 9 enfants sur 10 hospitalisés pour infection à VRS sont nés à terme, et 87 % à terme et en bonne santé. Et les hospitalisations pour VRS représentaient 28 % de toutes les hospitalisations chez les moins de 1 an en 2018. Les admissions en unité de soins intensifs (USI) représentaient, elles, 3 % de ces hospitalisations – dont 95 % chez des moins de 1 an – parmi lesquels un sur deux était né à terme. Cette étude a parallèlement montré que le coût annuel moyen des hospitalisations associées au VRS ont augmenté de 93,2 à 124,1 millions d’euros entre 2010-11 et 2017-18 ; 80 % des dépenses étant liées aux moins de 1 an, 66 % aux nourrissons nés à termes, un chiffre qui s’élève à 89 % si l’on y ajoute ceux dont l’âge gestationnel est inconnu.
Rappelons que le VRS est un virus quasi obligatoire dans la vie des enfants, puisque 90 % d’entre eux auront été infectés avant l’âge de 24 mois. Les réinfections sont également possibles chez un même enfant au cours de la même année. Enfin, il peut toucher tous les âges de la vie et notamment l’adulte jeune ou de plus de 50 ans présentant des facteurs de risque. Chez ces derniers, les données épidémiologiques restent malheureusement parcellaires. Aussi, une politique de santé publique dédiée aux infections VRS doit intégrer l’ampleur des cas touchant les enfants non vulnérables a priori, d’autant que le risque de transmission entre eux et les enfants à risque est élevée (collectivités, fratries), ainsi que, dans une moindre mesure, la contamination des adultes. Or, chez ces derniers, les données sont rares. Elle ne doit pas omettre la notion des soins ambulatoires, nécessaires chez près de 20 % des enfants infectés, et des conséquences cliniques secondaires à l’infection (réhospitalisations, wheezing, etc.). Il semble donc essentiel de déployer une meilleure information des parents, une prévention plus efficace, de diffuser des méthodes diagnostiques ambulatoires et à l’hôpital, ainsi qu’une réflexion sur le maintien de certaines mesures barrières vis-à-vis des populations jeunes ou vulnérables.
Infection invasive à méningocoques : les risques spécifiques des 15-24 ans
Avant la pandémie, le sérogroupe B était prédominant, bien qu’en diminution régulière depuis quelques années, tandis que les sérogroupes W et Y ont progressivement augmenté. Quelle évolution épidémiologique attendre avec la fin de la pandémie ? L’augmentation du séroroupe W doit être particulièrement surveillée du fait de l’importante létalité qui lui est associée (33 % des décès par IIM), et de sa capacité à toucher l’ensemble des classes d’âge, mais principalement les moins de 5 ans, les 15-24 ans et, dans une moindre mesure, les plus de 65 ans.
Au Royaume-Uni, les premières données montrent une recrudescence des cas chez les adolescents et une étude récente française évoque également une augmentation des IMM B fin 2021. « Le futur reste donc incertain ». Le diagnostic d’IIM ne doit être négligée chez personne, sachant que 79 % des cas surviennent chez des sujets n’ayant aucun facteur de risque identifié. Les adolescents méritent une attention particulière car ils jouent un rôle clé dans le portage et la transmission des infections à méningocoques de par leur comportement et interactions sociales favorisants (tabagisme, fréquentation de lieux clos, contacts sociaux rapprochés, etc.). Parce que leurs signes cliniques d’IIM sont souvent aspécifiques, et qu’ils tendent à consulter plus tardivement, ils sont exposés à un risque de décès élevé face à la course contre la montre que représente la prise en charge de l’infection invasive.
Rappelons que durant les 8 premières heures suivant l’infection, les signes cliniques sont non spécifiques quel que soit l’âge du sujet. De 8 à 12 heures après, certains signes, comme une apathie chez le nourrisson, motivent la consultation mais les autres, souvent génériques, justifient moins le recours à un avis médical dans la consultation dans les autres classes d’âge (maux de tête, nausées, vomissements, etc.). C’est 12 à 16 heures après le début de l’infection que le tableau de méningite s’installe, facilement repérable chez l’enfant (fontanelle bombée, altération franche de l’état général), mais de façon souvent moins évidente chez les autres, même si certains symptômes atypiques peuvent alerter (temps de recoloration, fréquence respiratoire ou cardiaque élevées). Dans les 16 à 24 heures suivant l’infection, le tableau hémodynamique et neurologique est typique et rend la suspicion d’IIM plus évidente, mais peut conduire au décès malgré une prise en charge adaptée. Ici aussi l’enjeu de santé publique est important : 25 % des enfants infectés en France présentent au moins une séquelle – principalement neurologique – et 10 % plus d’une séquelle.
Certaines études décrivent des troubles de l’apprentissage et un retard scolaire dans les années suivant l’IIM chez le jeune enfant, d’autres suggèrent un échec deux fois plus fréquents aux examens. Ce constat plaide pour une prise en charge pluriprofessionnelle et transversale, à la fois médico-sociale et sociale, durant le suivi post-événement aigu. Certains pays proposent d’ores et déjà des procédures d’accompagnement de ces patients recouvrant ces diverses dimensions. Le seul véritable outil de prévention reste cependant la vaccination. Le nouveau calendrier vaccinal intègre plusieurs nouveautés concernant les recommandations de vaccination contre les méningocoques.
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