Publié le 15 jan 2013Lecture 9 min
Hypospadias : que faire, que proposer ?
J. MOSCOVICI, Service de chirurgie pédiatrique viscérale, Hôpital des Enfants, Toulouse
Sous le terme d’hypospadias, on regroupe des situations anatomiques très variées, de la simple anomalie cutanée jusqu’à des atteintes sévères des différents constituants du pénis. Ainsi, sur le plan thérapeutique, les indications peuvent s'étendre de l’abstention pour un défaut cutané mineur jusqu’à l’utilisation de techniques chirurgicales complexes pour les formes sévères. L’approche clinique : prendre en charge un hypospadias, c’est d’abord faire un bilan précis des anomalies anatomiques. Celles-ci sont liées à un défaut de développement, d’intensité variable, des différents tissus de la face inférieure du pénis. Par définition, il existe tout d’abord une anomalie de situation de l’orifice urétral qui s’ouvre à la face ventrale du pénis, en position variable entre le sommet du gland et le périnée. En aval du méat, l’urètre est réduit à une plaque plus ou moins large et plus ou moins longue, le gland étant étalé. Le méat est souvent sténosé, mais ceci est habituellement sans conséquence. On peut définir deux grands groupes d’hypospadias, les formes antérieures, distales, les plus fréquentes (figure 1) et les formes postérieures, proximales, sévères, plus rares (figure 2).
L’approche clinique Prendre en charge un hypospadias, c’est d’abord faire un bilan précis des anomalies anatomiques. Celles-ci sont liées à un défaut de développement, d’intensité variable, des différents tissus de la face inférieure du pénis. Par définition, il existe tout d’abord une anomalie de situation de l’orifice urétral qui s’ouvre à la face ventrale du pénis, en position variable entre le sommet du gland et le périnée. En aval du méat, l’urètre est réduit à une plaque plus ou moins large et plus ou moins longue, le gland étant étalé. Le méat est souvent sténosé, mais ceci est habituellement sans conséquence. On peut définir deux grands groupes d’hypospadias, les formes antérieures, distales, les plus fréquentes (figure 1) et les formes postérieures, proximales, sévères, plus rares (figure 2). Certains cas sont trompeurs : le méat peut être distal, mais tout l’urètre terminal est anormal, sans corps spongieux, très adhérent à la peau, en fait non utilisable lors de la réparation. Ces cas correspondent en fait à des formes proximales. La courbure du pénis est habituelle. Le plus souvent, il s’agit d’une simple courbure du gland liée à la rétraction des enveloppes superficielles. La courbure du corps du pénis, plus rare, est secondaire à une rétraction des enveloppes profondes plus ou moins associée à une brièveté de la plaque urétrale ou de l’urètre. Exceptionnellement, la courbure est en relation avec une déformation des corps caverneux. L’anomalie cutanée est pratiquement constante. Le fourreau est habituellement insuffisant à la face inférieure ce qui contribue à la cassure du gland et entraîne un enfouissement du pénis dans les tissus scrotaux. Le prépuce est généralement ouvert à sa face inférieure et plus ou moins anormal à la face supérieure. Figure 1. Forme distale d’hypospadias. Certaines formes sévères s’accompagnent d’un enlisement du pénis entre les bourses et d’une bifidité scrotale. Dans quelques cas, le prépuce est strictement normal ; l’anomalie urétrale est alors souvent découverte tardivement, lors du premier décalottage. La place des examens complémentaires Il n’est actuellement pas envisageable de pratiquer un bilan étiologique chez tous les enfants porteurs d’hypospadias, compte tenu de la fréquence élevée de cette malformation. Il faut cependant toujours garder à l’esprit que l’anomalie génitale peut s’intégrer dans le cadre d’un désordre sévère de la différenciation sexuelle et, dans certains cas, il est fondamental, dans une approche pédiatrique multidisciplinaire, de réaliser un bilan endocrinien, génétique et morphologique (cf. article de Claire Bouvattier). Ceci est particulièrement vrai dans les situations suivantes : formes sévères d’hypospadias, anomalie de migration testiculaire associée (notamment testicule impalpable), micropénis, malformations associées et certaines formes familiales. Qui opérer ? Sauf pour les défauts très mineurs du prépuce et du méat, une intervention doit être proposée à la famille en l’informant longuement sur l’anatomie de la malformation, ses conséquences, les modalités opératoires et post-opératoires, et les complications. Figure 2. Forme proximale d’hypospadias. L’intervention est nécessaire dans les formes postérieures et moyennes en raison des conséquences urinaires et génitales. Dans les formes les plus distales, pour lesquelles le retentissement fonctionnel est moins important et le problème essentiellement esthétique, la famille accepte habituellement l’intervention pour limiter les conséquences psychologiques. Les familles sont parfois plus exigeantes sur les résultats dans ces formes distales que dans les formes proximales où un résultat même un peu imparfait est tout de même mieux vécu que la situation initiale. Quand opérer ? Il n’y a pas de consensus sur l’âge minimal d’intervention. Certains opèrent très tôt (3 à 6 mois), mais la plupart des auteurs prévoient l’intervention entre 12 et 18 mois, attendant que la première phase de croissance du pénis soit terminée, selon la courbe de Schoenfeld. Par contre, il y a un consensus pour ne pas opérer les enfants entre 2 et 4 ans, ceci pour deux raisons intriquées. D’une part, les suites opératoires sont souvent moins simples chez les enfants continents, avec de possibles épisodes de rétention, source de complications locales. D’autre part, le retentissement psychologique peut être important, l’enfant se sentant agressé et ne comprenant pas les explications qui lui sont fournies. Dans certains cas, l’intervention sera précédée d’une androgénothérapie, en particulier dans les formes sévères, de façon à obtenir une meilleure taille du pénis et une meilleure trophicité des tissus. Elle peut être réalisée par voie intramusculaire ou par voie percutanée, mais il est important que ce traitement soit fait suffisamment à l’avance par rapport à la chirurgie en raison du rôle inhibiteur de la testostérone sur la cicatrisation. Traitement Les principes chirurgicaux Le premier temps opératoire consiste à libérer les enveloppes superficielles à la face ventrale du pénis. Dans la majorité des cas, dans les formes antérieures, ce geste permet d’obtenir une rectitude du pénis et du gland. S’il persiste une courbure, ce que permet de vérifier un test d’érection provoquée, l’intervention se poursuivra par l’ablation de tous les tissus fibreux au contact des corps caverneux, éventuellement associée à une section de la plaque urétrale si elle est rétractée. Ce n’est que rarement que l’on doit effectuer un geste complémentaire sur les corps caverneux, soit un raccourcissement dorsal, soit un allongement ventral. Il faut ensuite reconstruire l’urètre manquant. L’urétroplastie peut être faite par fermeture directe de la plaque urétrale (intervention de Duplay) éventuellement élargie par la procédure de Snodgrass. On peut réaliser l’urètre en complétant la plaque urétrale par un lambeau cutané, découpé à la face inférieure du fourreau (intervention de Mathieu) ou à la face interne du prépuce (urétroplastie onlay). Parfois, il faut reconstruire toute la circonférence de l’urètre et on peut créer un tube soit par un lambeau pédiculé de peau préputiale (intervention de Duckett), soit par un greffon libre, buccal ou vésical. Dans certains cas, l’aspect peut être corrigé par une simple fermeture du gland (balanoplastie), ou par une technique d’avancement du méat. L’urètre reconstruit est protégé par la fermeture du corps spongieux (spongioplastie) ou/et par un lambeau de tissu sous-cutané pour prévenir l’apparition d’une fistule. La reconstruction des plans superficiels comprend la fermeture du gland et de la collerette préputiale puis la réparation du fourreau, souvent au moyen de lambeaux de peau préputiale, en replaçant la jonction péno-scrotale en bonne position. Le prépuce peut parfois être reconstruit. En raison du caractère hémorragique de l’intervention, il est préférable de mettre un pansement compressif mais non ischémiant pour quelques jours. Un drainage des urines, éventuellement associé à une antibioprophylaxie, est maintenu pour une durée variable selon le chirurgien et la technique utilisée, ce qui conditionne la durée d’hospitalisation. Certaines techniques sont cependant réalisables en hospitalisation de jour, même si un drainage est nécessaire. Les soins post-opératoires, à domicile, sont réduits à de simples soins d’hygiène, évitant toute macération qui pourrait compromettre la cicatrisation. La chirurgie de l’hypospadias est habituellement une chirurgie en un temps. Cependant, dans certaines formes sévères ou lors de reprises, certains chirurgiens préfèrent une approche en deux temps, plus sûre, dont les modalités peuvent être très diverses. Les résultats Cette chirurgie est marquée par un taux assez élevé de complications, même pour les formes qui paraissent les plus simples à corriger, y compris dans des mains expérimentées. Ces complications sont des fistules, des sténoses, des désunions…, dont la réparation est parfois difficile. Elles peuvent survenir tardivement, ce qui impose une surveillance au long cours, au moins jusqu’à la fin de la croissance, au mieux même à l’âge adulte pour les formes sévères. Conclusion L’hypospadias est une malformation fréquente, nécessitant le plus souvent une intervention chirurgicale. Cette chirurgie, même pour les formes apparemment simples, reste une chirurgie difficile, minutieuse, devant respecter des principes très précis et nécessitant donc une grande expérience. Son but est d’obtenir à long terme un résultat cosmétique correct (pour le patient et non seulement pour le chirurgien) et un bon résultat fonctionnel, tant sur le plan mictionnel que sexuel, sans que la malformation laisse trop de traces sur le plan psychologique.
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