Publié le 25 oct 2024Lecture 3 min
ESPID 2024 - Analyse d’urine normale chez le nourrisson : faut-il demander une culture ?
Catherine FABER, Saint Mandé
L’infection urinaire (IU) constitue un diagnostic différentiel important à considérer devant une fièvre sans cause apparente chez les jeunes enfants. Son diagnostic nécessite une analyse et une culture d’urine.
• D’après le débat entre R. Yalcinkaya (Turquie) et A. Muñoz-Ramos (Espagne) et R. Yalcinkaya. Session spéciale “Young ESPID Symposium: Diagnostics assays in infectious diseases: back to basics”.
L'analyse d’urine est considérée comme positive en présence d’au moins un des critères suivants : un test positif pour l’estérase leucocytaire sur une bandelette ; > 5 globules blancs (GB) par champ à fort grossissement dans un prélèvement d’urine centrifugée ; > 10 GB/mm3 dans l’urine non centrifugée(1). D’après les dernières recommandations américaines pour les enfants fébriles âgés de 8 jours à 2 mois, si les résultats de l’analyse d’urine sont normaux, il est inutile de faire une culture(2). Un certain nombre de données de la littérature conduit à s’interroger sur l’application à la lettre de ces recommandations.
Opportunités ratées de diagnostic précoce ?
L’un des bémols est l’augmentation de l’incidence et de la sévérité des cicatrices rénales en cas de traitement retardé (≥ 72 heures) d’un premier épisode d’IU fébrile durant la petite enfance(4). À cet argument s’oppose un argument économique issu d’une étude mettant en évidence le coût élevé de la prise en charge ambulatoire et hospitalière des IU pédiatriques aux États-Unis(5). Cependant, une autre étude a montré que 11,7 % des nourrissons de moins de 3 mois sortis des urgences avec une analyse d’urine normale ont eu secondairement un diagnostic d’IU(6). Près de trois quarts des 15 enfants dont la culture d’urine est revenue positive avaient moins de 1 mois et, dans tous ces cas, la seconde analyse d’urine était négative. Dans la même publication, on constate néanmoins qu’aucun des enfants n’a développé une infection bactérienne grave. Reste aussi à savoir s’il s’agissait ou non d’une réelle IU. Trois cas de figure peuvent en effet être envisagés : une sensibilité insuffisante du test, une culture d’urine positive due à une contamination ou une bactériurie asymptomatique.
D’autres auteurs rapportent qu’il est possible, chez les enfants de 2 à 24 mois, de manquer le diagnostic d’IU avec l’algorithme proposé par les recommandations américaines(7). En cas d’IU avec analyse d’urine négative et culture positive, ils observent que les lésions rénales concernent principalement les plus jeunes (< 1 mois). Mais là encore, on ne peut pas écarter l’hypothèse d’une bactériurie asymptomatique dont le dépistage et le traitement ne sont pas recommandés(8). En outre, une culture d’urine faussement positive peut être à l’origine d’une augmentation de la durée de l’antibiothérapie, avec des risques bien connus, et de l’hospitalisation(9). Certes, mais on a constaté l’absence de pyurie dans l’analyse d’urine chez plus d’un enfant sur 5 atteints d’une IU non liée à Escherichia coli(10).
Les germes impliqués dans les IU sont dominés par les entérocoques (33 %), suivis par les Klebsielles et Proteus (25 %), et le Pseudomonas (14,5 %). Or, le reflux vésico-urétéral de stade III/IV est moins fréquent au cours des IU à E. coli (1,8 %) que des IU dues à d’autres bactéries uropathogènes (14,8 %). Il en est de même pour les cicatrices rénales (1,8 % et 3,7 %). Il ne faut toutefois pas perdre de vue l’influence majeure des méthodes de collecte, de stockage et de conservation des échantillons d’urine sur les résultats des cultures(11).
Au total, cette confrontation des arguments de la littérature en faveur et en défaveur de la culture après une analyse d’urine normale chez le nourrisson met en lumière l’importance d’une prise en charge individualisée prenant en compte l’âge, la présence de fièvre, les symptômes cliniques, l’histoire médicale et les autres facteurs de risque.
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