Publié le 06 mar 2022Lecture 3 min
Un dys peu connu chez l’enfant : la dyschronie ou le défaut d’organisation temporelle
Bertrand CHEVALLIER, Boulogne-Billancourt
« Il y a trois temps : le temps du passé, le présent du présent, le présent du futur. Le présent du passé, c’est la mémoire ; le présent du présent, c’est l’intuition directe ; le présent de l’avenir, c’est l’attente »
Saint-Augustin (Ve siècle après J.-C)
Le programme officiel de l’Éducation nationale indique que dès l’école maternelle, l’enfant doit apprendre à « mieux se situer dans l’espace et dans le temps ». Toutes les études ne s’accordent pas sur la chronologie des acquisitions, mais on peut retenir comme critère de vigilance diagnostique qu’« hier ou demain » et « matin ou après-midi » sont distingués à 5 ans, que les jours de la semaine sont connus à 6 ans, les mois et les saisons entre 7 et 8 ans, le jour du mois à 9 ans, et l’estimation des délais complexes (par exemple, combien de mois séparent le jour de l’an des grandes vacances ?) ou l’appréciation d’une durée (depuis combien de temps sommes-nous à table ?) vers l’âge de 12 ans. La dyschronie est une difficulté à appréhender toute notion du temps ou organisation temporelle. C’est une pathologie très peu étudiée, bien qu’elle semble fréquemment accompagner les autres troubles dys et le TDA/H. Elle se caractérise par une peine à se repérer dans le passé et par une absence de projection dans le futur (la notion du temps se limite alors souvent à hier et demain). La dyschronie n’étant pas vraiment étudiée, les signes découlent d’observations de parents et d’enseignants, et pas d’études scientifiques :
notion du temps inexistante ou instable : ne sait généralement pas quelle partie de la journée ou de la semaine, il est en train de vivre, et cela malgré des repères tels que les repas ou les journées d’école ;
difficultés pour apprendre à lire l’heure : va apprendre à lire l’heure plus tard que les autres enfants et aura de la peine à en comprendre les concepts généraux (exemples : 13 heures = 1 heure de l’après-midi, 0 heure = minuit) ;
difficultés à retenir les notions temporelles : a de la peine à situer les mois de l’année (lequel vient après lequel, quel mois on est), les semaines, les saisons, les équivalences de temps (une semaine = 7 jours, une année = 365 jours = 12 mois, etc.) ;
difficultés à gérer le temps en conjugaison : parvient difficilement à faire correspondre un temps (passé, futur, présent) avec des termes tels que hier, demain, maintenant.
Car, contrairement à une idée reçue, le sens du temps n’est pas inné : il se construit progressivement au cours de l’enfance, par le biais d’intuitions, d’apprentissages et, surtout, de raisonnements. Au fur et à mesure que l’enfant grandit, il prend conscience de l’écoulement de son existence, il est capable de se souvenir, de se projeter dans l’avenir, d’organiser sa pensée... Confinement et « instabilité » ne semblent pas faire bon ménage. « En effet, l’un nous oblige à rester confiné à la maison (Covid-19) tandis que l’autre, nous empêche de nous contenir », rapportait avec justesse un adolescent hyperactif et souffrant d’une dyschronie associée. Quand le sens du temps ne se construit pas normalement, c’est l’existence tout entière qui est affectée : comment avancer dans la vie quand des notions essentielles comme l’heure, la journée, le mois, l’année, etc. vous échappent ? Plus ou moins aigus, ces troubles du temps – ces « dyschronies » – sont heureusement loin d’être aussi irréversibles que le temps lui-même.
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