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ORL et Stomatologie

Publié le 17 mar 2020Lecture 7 min

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil de l’enfant : quelles alternatives à l’adéno-amygdalectomie ?

Nicolas LEBOULANGER, ORL et chirurgie cervico-faciale pédiatrique, hôpital Necker-Enfants malades ; Faculté Paris V René-Descartes, Paris

En 2018, la Société française d’ORL a émis des recommandations sur la prise en charge du syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) de l’enfant. Ces recommandations font le point sur la démarche diagnostique clinique, la place des explorations complémentaires et le choix de la thérapeutique qu’elle soit chirurgicale ou médicale(1). Dans une grande majorité de cas, le traitement chirurgical de référence, l’adénoamygdalectomie, est indiqué.

Une grande majorité de SAOS est en effet, chez l’enfant, secondaire à une hypertrophie des amygdales et des végétations. La conduite à tenir dans la majorité des cas est claire tant dans le choix de la stratégie et de la technique chirurgicale(2,3) que dans celui d’un éventuel bilan préopératoire(4). Dans un nombre non négligeable de cas néanmoins, l’adénoamygdalectomie peut ne pas être indiquée ou ne pas être suffisante pour lever d’une manière satisfaisante l’obstruction des voies respiratoires lors du sommeil. Chez les patients concernés, une thérapeutique alternative ou complémentaire peut alors être indiquée. Qu’elle soit chirurgicale ou médicale, le principe général est globalement le même : réduire la taille du contenu (des voies aériennes) ou augmenter la taille du contenant (les voies aériennes) afin de diminuer les résistances à l’écoulement de l’air. Enfin, les traitements listés dans cet article ne seront évidemment indiqués qu’après un bilan clinique et éventuellement un bilan paraclinique rigoureux, qui nécessite l’avis d’un ORL compétent en pédiatrie. Traitements chirurgicaux La septoplastie Cette intervention, réalisée par voie endonasale, a pour but de traiter une déviation osseuse et/ou cartilagineuse du septum nasal et de lever ainsi une obstruction non accessible aux traitements médicaux (figure 1). Figure 1. Déviation septale antérieure droite chez un adolescent. Une déviation septale peut être acquise, post-traumatique, ou congénitale. La plupart des déviations septales, très fréquentes, sont a- ou pauci-symptomatiques. Seules relèveront donc d’une intervention celles dont la participation chez l’enfant à une obstruction nasale importante retentissant sur le sommeil est certaine. L’âge minimum de réalisation n’est pas établi(5), mais elle ne doit clairement être indiquée chez l’enfant qu’au cas par cas et dans l’idéal après une évaluation objective de la déviation (fibroscopie, scanner du massif facial) et de son retentissement (enregistrement du sommeil). La résection cartilagineuse sera minimale et économe, juste suffisante pour lever l’obstacle sans compromettre la croissance nasale. La turbinoplastie inférieure Cette intervention vise à réduire le volume des deux cornets inférieurs, en général par une délivrance locale d’énergie générant une fibrose (laser, radiofréquence), plus rarement aux instruments froids. Une turbinoplastie inférieure chez l’enfant est possible en cas d’obstruction nasale symptomatique et résistante au traitement médical, quel que soit l’âge. Elle est souvent réalisée dans un contexte malformatif chez le nouveau-né, le nourrisson et le petit enfant et dans certaines pathologies comme l’achondroplasie. Chez l’enfant plus âgé ou l’adolescent, on s’attachera à bien évaluer le vécu du patient avant de proposer un geste. Enfin, là encore, documenter l’obstruction (scanner, enregistrement du sommeil) est souhaitable avant de réaliser un geste. À noter que les vasoconstricteurs locaux qui sont utilisés chez l’adulte comme test diagnostique sont contre-indiqués chez l’enfant (âge minimum de 15 ans pour la plupart). Réduction des amygdales linguales La base de la langue peut être le site d’une hypertrophie du tissu lymphoïdien appartenant à l’anneau de Waldeyer. Les « amygdales linguales » peuvent être tellement hypertrophiées qu’elles la causent ou participent à la genèse d’un véritable SAOS, la plupart du temps chez des enfants obèses ou atteints de trisomie 21. Elles sont mises en évidence par la fibroscopie en consultation ou plus rarement lors d’une endoscopie du sommeil. Ces amygdales linguales peuvent être chirurgicalement réduites par radiofréquences, concomitamment ou pas à une adéno-amygdalectomie classique. Pathologies complexes du pharynx et linguales Les étroitesses du pharynx sont presque toujours liées à une malformation complexe du massif facial (facio-craniosténoses). Si des techniques d’élargissement ont été décrites, aucune n’a réellement convaincu et seule l’avancée du tiers moyen de la face couplée a une ostéodistraction mandibulaire par fixateurs externes a fait la preuve d’une efficacité sur le SAOS. Les macroglossies, qu’elles soient secondaires à une pathologie locale comme une malformation lymphatique, ou générale comme dans la trisomie 21, l’hypothyroïdie, ou le syndrome de Wiedemann-Beckwith, sont assez peu souvent responsables de SAOS. Les indications de glossoplasties chez l’enfant sont rares et plus souvent liées à des problèmes antérieurs (extériorisation, morsures, saignements) qu’à une ptose obstructive. Ces interventions, qui plus est douloureuses, n’ont donc pas leur place actuellement dans la prise en charge du SAOS. La glossoptose obstructive de l’enfant, postérieure, est presque toujours liée a une séquence de Pierre Robin. Au-delà du positionnement de l’enfant et de l’usage d’une VNI (voir infra), elle peut être prise en charge par labioglossopexie ou par ostéodistraction, avec de bons résultats sur l’obstruction. Pathologies laryngées Ces pathologies, congénitales ou acquises, peuvent participer à la physiopathologie d’une SAOS et requièrent une prise en charge spécifique par voie endoscopique (laryngomalacies sé - vères, par exemple) voire par voie externe (malformations laryngées complexes). Elles sont du ressort d’équipes spécialisées. La trachéotomie, dernier recours chirurgical, court-circuite tout obstacle sus-jacent. Elle ne s’envisage bien sûr qu’en cas de symptomatologie sévère dans un contexte complexe : malformations associées, impossibilité ou inefficacité de la VNI (ventilation non invasive). Une trachéotomie chez l’enfant est associée à une morbidité et à une mortalité intrinsèques supérieures à celle de l’adulte, et ce d’autant plus qu’il est prématuré et/ou de petit poids(6). Figure 2. Fosse nasale gauche, vue endoscopique ; hypertrophie turbinale inférieure. Figure 3. Nourrisson présentant une séquence de Robin ; important rétrognatisme. Traitements médicaux La ventilation non invasive (VNI) La VNI consiste à appliquer une pression positive continue pour libérer les voies aériennes via une interface non invasive (masque nasal le plus souvent). Chez les enfants présentant une pathologie ORL obstructive, c’est une PPC (pression positive continue), CPAP en anglais (Continuous positive airway pressure) qui est nécessaire dans la plupart des cas. Une VNI sera indiquée en cas de SAOS sévère sans hypertrophie adénoïdoamygdalienne ou après chirurgie de cette dernière si l’obstruction respiratoire pendant le sommeil persiste, en cas d’obstruction complexe et/ou liée à une comorbidité importante (hypoventilation alvéolaire, obésité morbide, dysplasie broncho-pulmonaire), et enfin en cas de contre-indication à la chirurgie. Une VNI peut également être tentée dans certains cas quand le dernier recours chirurgical envisagé est la trachéotomie(7). L’orthodontie et l’orthophonie Un bilan orthodontique est recommandé chez l’enfant, et surtout le grand enfant ou l’adolescent, en cas de SAOS sans hypertophie adéno-amygdalienne ou si l’obstruction persiste après chirurgie. La rééducation, elle, permettrait d’améliorer le positionnement lingual et de stabiliser les résultats chirurgicaux en cas de persistance d’une déglutition primaire. Corticoïdes par voie nasale Les corticoïdes par voie nasale peuvent être proposés en cas de SAOS léger à modéré si une hypertrophie adénoïdienne isolée en est la cause. Cette hypertrophie aura donc préalablement été objectivée par une fibroscopie par voie nasale. Ces corticoïdes peuvent également être utilisés en cas de SAOS résiduel après adéno-amygdalectomie. Dans tous les cas, ils peuvent améliorer le patient, voire faire disparaître ce SAOS résiduel. Ils peuvent être également utilisés pour traiter une rhinite associée participant à l’obstruction(1). Certaines équipes ont mis en évidence qu’un traitement prolongé par montélukast par voie nasale permettrait également d’améliorer la qualité du sommeil des enfants. Cette molécule n’existe en France cependant que sous forme orale et n’a d’autorisation de mise sur le marché que pour le traitement de l’asthme. En conclusion Le SAOS de l’enfant est une pathologie fréquente et dans l’immense majorité des cas, son diagnostic et sa prise en charge sont simples. Dans certains cas de figure en revanche, une thérapeutique alternative et/ou complémentaire peut être né cessaire. Il appartient au praticien d’identifier ou de suspecter ces cas de figure et d’adresser les patients à un ORL com pétent en pédiatrie. Ce qu'il faut retenir • La grande majorité des SAOS de l’enfant sont dus à une hypertrophie adéno-amygdalienne. • L’adéno-amygdalectomie est donc le traitement de 1re intention. • Dans certains cas, un autre niveau d’obstruction est présent et mérite donc une prise en charge spécifique. • Ces obstructions plus complexes sont mises en évidence lors d’un examen ORL pédiatrique.

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