publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Endocrinologie-Diabétologie

Publié le 12 juin 2007Lecture 10 min

Quand le testicule n’est pas à sa place : Que faire devant une cryptorchidie ?

G. WEISGERBER - Clinique Saint-Jean-de-Dieu - Paris
Ce sujet de pédiatrie, pratique par excellence, découle de la question qui nous est posée quand arrive au monde un nouveau-né de sexe mâle : Docteur, a-t-il bien tout ce qu’il faut là où il faut ? C’est, bien sûr, du testicule dont on parle, cette précieuse gonade mâle faisant l’objet de trois questions : quelle est sa place ? quand est-elle en place ? comment le savoir ?
L’origine et la migration du testicule Les cellules germinales naissent de l’ectoderme extra-embryonnaire et migrent vers la crête gonadique qu’elles colonisent à la 5e semaine de gestation. Le testicule fœtal est localisé au niveau de l’anneau inguinal profond à la fin du premier trimestre. Au cours du deuxième trimestre, guidé par le gubernaculum testis, il traverse le canal inguinal qu’il a franchi au 6e mois. Il atteint sa place définitive au fond du scrotum entre le 7e et le 9e mois. Le canal déférent fusionne avec l’épididyme au cours de cette migration. Lors de son passage par l’anneau inguinal, le testicule s’entoure du péritoine et l’entraîne avec lui en formant un canal dit péritonéo-vaginal. Ce canal, d’abord perméable, va s’occlure dans sa partie moyenne en formant un ligament. Il laisse autour du testicule un douerepli de péritoine appelé « vaginale testiculaire » qui comporte une cavité virtuelle entre ses deux feuillets. Les troubles de résorption du canal péritonéo-vaginal sont à l’origine d’une pathologie associée fréquente : hydrocèle, kyste du cordon, et surtout hernie inguinale.   La migration du testicule dépendrait de sa propre fonction Les facteurs qui déterminent la migration du testicule sont mal connus et font d’abord rechercher un trouble au niveau de l’axe hypothalamo-pituito-testiculaire concernant trois hormones : la FSH, la LH et la testostérone. Qu’il s’agisse d’une anomalie haute ou d’un défaut proprement testiculaire, c’est le testicule lui-même qui serait l’élément déterminant de sa propre migration, et ses altérations seraient les premières responsables de ses défauts : atrophie ou hypotrophie testiculaire, dysgénésie testiculaire atteignant les cellules germinales ou de soutien (ce qui expliquerait les troubles de fertilité et le risque tumoral), microlithiases. Gabriel Laurence disait dans la Revue du Praticien que le testicule était « auto-mobile ». De fait, l’anomalie de migration apparaît avec une grande fréquence associée aux malformations congénitales (60 %) et aux anomalies chromosomiques (12 à 25 %). C’est pourquoi on parle à son propos de cryptorchidisme, terme qui intègre dans un contexte plus vaste la simple anomalie de situation(1). Il existe un retard possible de la migration spontanée, dont la date butoir est habituellement fixée à 1 an.   La localisation du testicule La place du testicule est dans le scrotum. S’il n’y est pas, on parle de cryptorchidie (caché) plutôt que d’ectopie (en dehors). Il est normalement intrascrotal à la naissance. L’incidence de la cryptorchidie va de 3,8 % à 5,8 % chez l’enfant à terme, deux tiers sont unilatérales, un tiers bila-térales. À 6 mois, la prévalence diminue de 0,8 % chez l’enfant à terme et jusqu’à 10 % chez le prématuré selon la date. Il existe donc un retard possible de la migration spontanée, dont la date butoir est habituellement fixée à 1 an. Des migrations ont été rapportées en période prépubertaire, mais leur réalité se heurte aux difficultés d’appréciation des examens cliniques et la plupart concernent sans doute la fixation habituelle, à cette période, des testicules dits « ascenseurs ».   Examen clinique Le meilleur moyen de savoir si le testicule est en place est l’examen clinique. Il implique une certaine habitude et une technique appropriée : l’enfant en décubitus dorsal ou demi-assis, une main de l’examinateur à plat « évacuant » et bloquant l’orifice inguinal profond.     Figure 1. Scrotum plat.   À la naissance, il peut être gêné par le volume des bourses parfois infiltrées ou la présence d’un hydrocèle. Le scrotum peut être plat, effacé (figure 1), ce qui plaide pour l’absence d’un contenant, ou au contraire bien formé, ce qui fait suspecter un testicule qui a migré mais a pu involuer secondairement. Si la bourse est vide, on recherche le testicule sur le trajet habituel de migration, mais aussi en dehors car il existe 1 % d’ectopies « vraies » où la gonade est de topographie crurale voire fessière (figure 2). Il faut se méfier d’un possible testicule ascenseur, bien que son diagnostic ne se pose habituellement que plus tard entre 4 et 6 ans : la gonade remonte sous l’influence des contractions du crémaster, et son volume réduit lui permet parfois même de passer l’anneau inguinal et de disparaître.       Figure 2. Cryptorchidie vraie ou ectopie vraie ? Les conditions de l’examen à cet âge sont donc essentielles : enfant détendu en décubitus dorsal ou en position en tailleur ; et confronter les données de l’examen à celles qui auront été consignées à la naissance sur le carnet de santé. Cet examen débouche en pratique sur deux alternatives : le testicule est palpable ou n’est pas palpable. Il faut se méfier d’un possible testicule ascenseur, bien que son diagnostic ne se pose habituellement qu’entre 4 et 6 ans. Apprécier l’aspect du testicule est essentiel ; son volume, sa régularité, sa consistance, une asymétrie par rapport au testicule en place, sont autant de critères du pronostic. Il faut rechercher un petit nodule intrascrotal si la bourse paraît développée. Il faut aussi apprécier le volume du testicule controlatéral en place en cas d’anomalie unilatérale, car une hypertrophie est un facteur péjoratif pour la fonction du testicule cryptorchide.   Les anomalies associées à la cryptorchidie L’hypospadias La cryptorchidie est présente dans près de 60 % des malformations congénitales. Ce contexte malformatif habituellement au premier plan ne doit pas faire négliger la recherche et la description de l’anomalie testiculaire. À la naissance, l’hypospadias est facilement reconnaissable au prépuce dorsal. Il faut identifier son type et savoir qu’il pose la question de l’ambiguïté sexuelle, d’autant plus qu’il est postérieur ou s’associe à une anomalie de structure de la verge, coudure ou micropénis. L’anomalie de différenciation des organes génitaux externes doit dans ce contexte faire rechercher une anomalie chromosomique, une dysgénésie gonadique mixte, ou une hyperplasie congénitale des surrénales. L’orientation diagnostique relève d’un avis spécialisé, mais dès la maternité, un point est essentiel : réserver la déclaration de sexe, tant il est compliqué d’y revenir secondairement en cas d’erreur. La cryptorchidie est présente dans près de 60 % des malformations congénitales.   La hernie inguinale Elle est associée à la cryptorchidie dans une proportion de 40 %. Même si elle n’est pas apparente à la naissance, il faut en informer les parents par une description précise et leur souligner la nécessité d’une consultation rapide si elle s’extériorise, car il existe, en cas d’étranglement, un risque de retentissement sur la vascularisation du testicule. C’est pour cette raison que l’association hernie-cryptorchidie est la seule indication opératoire précoce d’orchidopexie, dans le même temps que le traitement de la hernie. De cet examen à la naissance, il faut laisser une trace écrite et descriptive sur le carnet de santé. Le terme habituellement rencontré : « OGE normaux » est vague, il faut lui préférer « testicules palpés normaux en place ». Ceci permettra plus tard d’éviter l’erreur sur un testicule non palpé, qui alors a toutes chances d’être un testicule ascenseur. Il faut aussi expliquer aux parents la possibilité de la survenue d’une torsion anténatale tardive quand un testicule réellement palpé s’est atrophié dans les premières semaines postnatales. L’association hernie-cryptorchidie est la seule indication opératoire précoce d’orchidopexie.   Examens complémentaires • L’échographie pour localiser le testicule est très aléatoire et bien moins fiable que l’examen clinique (fiabilités respectives de 44 % et 84 %). C’est sa technique qui est en cause, la sonde repoussant un testicule extériorisé. Et même si le testicule n’est pas palpable, elle est encore peu fiable et l’on ne peut en retenir que les résultats positifs. Son seul intérêt réside dans l’appréciation de la structure testiculaire. • Aucun examen complémentaire n’est nécessaire si la cryptorchidie est isolée et unilatérale ou bilatérale avec des testicules palpables. • Un avis uro-en-docrinologique est nécessaire en cas de cryptorchidie bilatérale ou d’association malformative, et surtout en cas d’hypospadias. • Pour l’orientation du sexe, la génitographie recherche une structure profonde type cavité vaginale ou résidu mullérien, car c’est le phénotype qui orientera le choix du sexe dans la perspective de la reconstruction génitale. • Pour caractériser l’ambiguité sexuelle, une étude chromosomique, une évaluation de la fonction gonadique peuvent être demandées : avant 3 mois par des dosages de FSH, LH et testostérone ; après 3 mois par une étude de la testostéronémie après stimulation par HCG.   Éléments justifiant le traitement de la cryptorchide   L’aspect cosmétique est celui sur lequel on est jugé, d’où l’importance de bien décrire initialement le testicule cryptorchide. Le risque de la chirurgie est vasculaire, surtout dans la première année où la dissection de vaisseaux fragiles génère 10 % d’atrophies testiculaires. D’où le consensus pour ne pas opérer avant l’âge de 1 an, date butoir également des migrations retardées ; cette règle est levée, s’il existe une hernie associée ou une cryptorchidie douloureuse faisant craindre une torsion.     Le retentissement sur la fertilité fait toujours débat(2). Le risque de stérilité serait 6 fois supérieur à celui de la population normale dans les cryptorchidies bilatérales, et négligeable dans les formes unilatérales. On sait que la fertilité dépend de la maturation des tubes séminifères et des cellules souches, que cette maturation s’exerce aux périodes périnatale et prépubertaire, et qu’elle est influencée par la situation du testicule. D’où le consensus habituel de pratiquer une intervention entre 1 et 2 ans. Il est malheureusement probable que la fertilité dépend du degré d’altération des structures testiculaires, lui-même partie prenante dans le trouble de migration, et que le traitement a peu d’influence sur elle. Le risque de stérilité serait 6 fois supérieur à celui de la population normale dans les cryptorchidies bilatérales, et négligeable dans les formes unilatérales.     Le risque de tumeur maligne à l’âge adulte est évalué entre 0,01 % et 1 % et concerne plus les testicules intra-abdominaux. Là encore, c’est la structure même du testicule qui semble en cause, justifiant l’exérèse des testicules dysplasiques, abaissables ou non, ainsi qu’une surveillance clinique annuelle, même après orchi-dopexie(3). Le traitement de la cryptorchidie est chirurgical L’hormonothérapie n’a plus cours actuellement. On fait appel au chirurgien. À lui d’apprécier, si l’orchidopexie en vaut la peine : certaines situations tel un testicule petit cryptorchide unilatéral avec testicule controlatéral normal justifieront une orchidectomie d’emblée et la discussion d’une pose de prothèse après la puberté. La technique habituelle est une dissection par voie inguinale suivie d’une fixation dans une poche ménagée entre la peau du scrotum et le darthos. Le facteur limitant est la longueur du pédicule spermatique, et donc concerne habituellement les testicules palpables. Quand le testicule n’est pas palpable, on préconise actuellement un traitement en deux temps, le premier par cœlioscopie pour localiser le testicule et interrompre la vascularisation haute spermatique, laissant le temps à la circulation basse par le gubernaculum testis de se développer ; l’abaissement du testicule est alors possible après section du pédicule spermatique. Le résultat, intéressant sur le plan cosmétique, devra être validé pour celui sur la fertililité.   Conclusion Le meilleur bénéfice que l’on puisse espérer du traitement de la cryptorchidie est cosmétique. Quant aux spermogrammes, il faut être prudent et éviter leur pratique systématique pour prédire l’avenir.                          

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  • 5 sur 12

Vidéo sur le même thème