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Allergologie - Immunologie

Publié le 06 fév 2023Lecture 6 min

CPAP 2022 - Avancées thérapeutiques dans l’asthme et la dermatite atopique de l’enfant

Johan PERSONNIC

Au cours d’un symposium qui s’est tenu dans le cadre du CPAP en novembre dernier, Guillaume Lezmi (Paris) et Nathalia Bellon (Paris) sont revenus sur l’actualité de la dermatite atopique (DA) et de l’asthme sévère de l’enfant.

Allergie dans l’asthme : place des biothérapies dans les formes sévères   G. Lezmi a souligné que l’asthme est une maladie hétérogène avec des symptômes communs expliqués par des mécanismes différents. L’asthme de l’enfant, d’autant plus qu’il est sévère, est un asthme souvent éosinophilique et allergique. Ainsi, dans la cohorte d’enfants asthmatiques sévères française Cobraped, à l’âge scolaire trois quarts d’entre eux avaient une rhinite allergique (RA), la moitié une DA et un tiers une allergie alimentaire. Leurs IgE totales sont élevées (443 Ku/L en moyenne), ainsi que l’éosinophilie (PNE à 400/mm3 en moyenne). À l’âge préscolaire, le profil des patients avec un asthme sévère est moins atopique, plus neutrophilique (IgE totales plus basses à 89 KU/L et PNE à 215/mm3 en moyenne). Toutefois, dans cette population, on trouve encore un patient sur deux avec une RA, un tiers avec une DA et 15 % avec une allergie alimentaire (Lezmi et coll. Allergy Clin Immunol Pract 2021). La relation entre asthme, DA et RA a été évaluée dans une étude incluant 9 801 enfants régulièrement suivis de leur naissance jusqu’à leurs 11 ans (Belgrave et coll. Plos Med 2014). Les enfants chez qui les sifflements ont persisté en grandissant étaient ceux qui présentaient des comorbidités atopiques associées. L’allergie est donc associée à la persistance de l’asthme. Contrairement aux croyances antérieures, la marche atopique (apparition d’une DA suivie d’un asthme puis d’une RA) ne représentait, dans cette population, qu’un phénotype non majoritaire (3,1 %). Le profil le plus fréquent d’enfants asthmatiques était les enfants dits « siffleurs transitoires », qui arrêtaient de siffler vers 6 ans et ne présentaient pas de comorbidité atopique (7,7 % de la population). Le profil dit « siffleurs persistants » le plus fréquent était celui associé à une RA d’apparition tardive (entre 5 et 8 ans environ) et représentait 5,7 % de la cohorte. Dans une cohorte anglaise de 906 enfants de 8 ans (Deliu et coll. Allergy 2015) les patients asthmatiques avec RA faisaient plus d’exacerbations fréquentes, d’exacerbations sévères, de cosultation répétées aux urgences et manquaient plus souvent l’école. Ainsi, la présence d’une rhinite allergique (RA) augmente la sévérite de l’asthme. Dans une étude américaine, incluant 619 enfants âgés de 6 à 17 ans (cohorte APIC, Pongracis et coll. JACI 2016), le score médicamenteux et le score de symptomatologie de la rhinite étaient des facteurs importants associés à la sévérité de l’asthme. La sévérité d’une rhinite allergique augmente donc la sévérité de l’asthme. Plus l’asthme était sévère, plus la prévalence des comorbidités atopiques (DA, allergie alimentaire, RA ou non) augmentait. Le lien entre allergie alimentaire (AA) et sévérité de l’asthme a été évalué via des questionnaires et des EFR répétés dans une cohorte de 300 enfants asthmatiques âgés de 5 à 13 ans aux États-Unis (Friedlander et coll. JACIP 2013). En comparaison aux enfants asthmatiques sans allergie, ceux ayant une AA étaient 2 fois plus souvent hospitalisés pour crise d’asthme, les traitements de l’asthme étaient plus importants et le VEMS plus bas. En cas de polyallergie alimentaire (> 1 allergie), les enfants étaient 4 fois plus souvent hospitalisés pour crise d’asthme, le traitement de fond était 2 fois plus élevé et le VEMS diminué en comparaison aux enfants non allergiques. La coexistence d’une allergie alimentaire IgE-médiée augmente donc la sévérité de l’asthme. L’asthme de l’enfant étant donc souvent allergique, sa prise en charge doit s’inscrire dans une démarche globale de dépistage et de prise en charge de l’ensemble des comorbidités atopiques. La fonction respiratoire d’un enfant augmente progressivement jusqu’à l’âge de 25 ans puis décline lentement. Cette évolution a été évaluée dans une cohorte américaine de 684 enfants âgés de 5 à 12 ans avec un asthme persistant (McGeachie et coll. NEJM 2016). Comparativement à des enfants sains, seuls 25 % d’entre eux avaient une fonction respiratoire normale à l’âge adulte. Les autres présentaient soit une croissance réduite de leur VEMS, soit un déclin précoce, soit les deux. Les facteurs de risque associés à une croissance anormale de la fonction pulmonaire étaient le sexe masculin et le fait d’avoir des EFR initiales anormales (VEMS de bas abaissé, obstruction fixée et/ou hyperréactivité bronchique). Trois biothérapies ont l’AMM en France en cas d’asthme sévère chez l’enfant de 6 ans ou plus : l’omalizumab, le mépolizumab et le dupilumab. • L’omalizumab (anti-IgE) est indiqué dans l’asthme allergique sévère persistant avec sensibilisation à un allergène perannuel et des IgE totales comprises entre 30 et 1 500 UI/ml. Chez l’enfant de 12 ans et plus, le VEMS doit être < 80 %. Dans une analyse posthoc de l’étude STELLAIR ayant inclus 149 enfants de 6 ans et plus, traités par omalizumab, le nombre de répondeurs (réduction du nombre de crise dans l’année suivant le traitement d’au moins 40 %) était plus élevée chez les enfants polyallergiques. Dans une autre étude s’étant intéressée à la réponse à court terme (4 mois) de 45 adolescents asthmatiques sévères traités par omalizumab en France, les meilleurs répondeurs étaient les patients polyallergiques/polysensibilisés avec une DA et des EFR normales. • Le mépolizumab (anti-IL5) a une AMM dans l’asthme sévère non contrôlé avec éosinophilie sanguine ≥ 150/mm3 et exacerbateur fréquent (≥ 2 exacerbations sévères sur les 12 derniers mois) ou avec traitement par corticoïdes oraux pendant plus de 6 mois dans l’année précédente. Toutefois les données sur le mépolizumab dans l’asthme sévère de l’enfant sont encore limitées. • Le dupilumab (anti-IL4-R) est indiqué dans l’asthme sévère non contrôlé avec éosinophilie ≥ 150/mm3 et/ou FeNO ≥ 20 ppb. Dans l’asthme sévère de d’enfant, cette biothérapie permet la réduction du taux annuel d’exacerbations sévères d’environ 60 % (étude voyage, 408 enfants de 6 à 12 ans avec un asthme sévère et une éosinophilie, traités par dupilumab ou placebo pendant 1 an). Cette réduction est d’autant plus importante que l’éosinophilie est importante (PNE ≥ 150 et/ou FeNO ≥ 20 ppb versus 300/mm3). On retrouve également chez ces patients une amélioration rapide du VEMS (Bacharier et coll. NEJM 2021). Ces résultats se maintiennent au moins 1 an après la mise en route du traitement (étude Excursion, 345 enfants ayant complété l’étude Voyage et qui ont été suivis pendant 1 an sous dupilumab (Bacharier et coll. ERS 2022). La tolérance sous dupilumab, 1 an après la fin de l’étude Voyage, est bonne avec toutefois des effets secondaires ORL relativement fréquents (5 à 10 % des patients atteints de pharyngites, de RA et/ou de conjonctivites, voire de kérato-conjonctivites). Le dupilumab est également efficace sur la DA modérée à sévère (Gooderham et coll. Am Acad Dermatol 2018 ; Simpsons et coll. JAMA Dermatol 2019) et dans la RA perannuelle (Weinstein et coll. Allergy Clin Immunol 2018). Ces biothérapies sont encore relativement récentes dans la prise en charge de l’asthme sévère de l’enfant et certains points doivent encore être éclaircis : – améliorer notre connaissance des marqueurs prédictifs de réponse aux biothérapies et, en cas de non-réponse, mieux comprendre les mécanismes impliqués dans cet échec (mécanisme inflammatoire non Th2 ?) ; – identifier précocement les phénotypes sévères pour accélérer la mise en place de biothérapies quand elles sont nécessaires ; – mieux définir les critères de bonne réponse aux biothérapies pour aider le praticien à la décision de poursuivre ou non le traitement. J. PERSONNIC D’après un symposium organisé par les laboratoires Sanofi dans le cadre du CPAP 2022

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