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Publié le 04 jan 2021Lecture 4 min

Hypertonie vagale chez l’enfant

Sonia SALMI-BELMIHOUB, Philippe CHEVALIER, Service de rythmologie, hôpital cardiologique Louis Pradel, Lyon

Environ 7 % de la population aurait un tonus vagal prononcé. L’éventail des manifestations cliniques de l’hypervagotonie est vaste, allant de la mort subite du nouveau-né à la syncope en passant par la bradycardie réflexe du nourrisson et l’allongement asymptomatique de l’intervalle PR sur l’ECG d’un adolescent. Une hérédité est souvent retrouvée. Nous rapportons le cas de deux enfants ayant présenté des syncopes vasovagales avec une expression clinique et une prise en charge différentes.

Observation n°1 JP, âgé de 15 ans, consulte pour lipothymies avec prodromes dont un épisode de perte de connaissance, l’ECG de base montre un allongement de l’intervalle PR à 220 ms. L’enregistrement Holter ECG objective des épisodes de bloc atrioventriculaire complet à QRS fins, l’échographie cardiaque ne retrouve pas de cardiopathie sous-jacente. Le test d’inclinaison reproduit les symptômes habituellement ressentis, avec réponse mixte vasoplégique et cardio-inhibitrice. La pression artérielle chute de 104/75 mmHg de mercure à 55/48 mmHg, la cadence sinusale de 96 à 45 battements par minute (bpm). L’exploration électrophysiologique montre un allongement de l’intervalle AH à 168 millisecondes et un point de Weinchebach à 440 ms. Après atropine, l’intervalle AH est à 146 ms le point de Weinchebach à 360 ms. Une origine vasovagale et retenue sans indication de stimulation définitive. Figure 1. ECG de JP, âgé de 15 ans (observation n°1). Observation n°2 TZ, âgée de 11 ans, est hospitalisée à plusieurs reprises pour syncope. Elle a des antécédents de canal atrioventriculaire opéré : patch de CIA et suture d’une cleft mitrale. Le tilt test est négatif. Un Holter ECG implantable est mis en place. Il montre lors de deux épisodes de malaise une pause sinusale de 10 secondes et l’autre de 20 secondes. D’autres malaises ne se sont pas accompagnés de troubles rythmiques. L’échographie cardiaque objective un bon résultat de la chirurgie. Une origine vasovagale est retenue mais un stimulateur cardiaque est implanté, en raison de syncopes répétées et d’antécédent de chirurgie cardiaque faisant craindre une participation organique au malaise. Lors d’un suivi, de 3 ans, TZ a présenté une lipothymie au cours de laquelle une activité du pace-maker a été enregistrée. Figure 2. ECG de TZ, âgée de 11 ans (observation n°2). Discussion La stimulation vagale déprime le nœud sinusal et la conduction atrioventriculaire. Elle est aussi responsable d’une baisse de la contractilité ventriculaire et d’une hypotension artérielle. Environ 6 à 8 % de la population a un tonus vagal prononcé(4). L’hypertonie vagale est détectée chez des enfants asymptomatiques lors d’enregistrements électrocardiographiques de routine. Il existe dans ces cas un allongement de l’espace PR au-delà de 200 ms, voire parfois un bloc atrioventriculaire du deuxième degré ou une bradycardie sinusale. Enfants et adolescents souffrant d’épisodes de perte de connaissance et de lipothymie sont souvent adressés en neurologie pour épilepsie, L’électroencéphalogramme est habituellement normal. Parfois, ces enfants traités par anticonvulsivants sans succès sont adressés en cardiologie à la recherche d’un substrat arythmogène, le plus souvent pour éliminer une canalopathie, tel qu’un syndrome du QT long. La syncope vasovagale est possible chez le nourrisson (reflux gastro-œsophagien) mais apparaît surtout à partir de l’adolescence, elle peut récidiver et être invalidante, et entraver le cursus scolaire. Les manifestations cliniques sont variables : bradycardie extrême, paralysie sinusale, bloc atrioventriculaire du deuxième degré ou réponse vasoplégique marquée. La phase post-critique avec pâleur et fatigue peut durer plusieurs heures. Souvent une accélération de la cadence sinusale précède la bradycardie. Le tilt test peut permettre d’authentifier les syncopes vasovagales et leurs mécanismes, vasoplégique et/ou cardio-inhibiteur. La composante vasoplégique est constante mais à des degrés divers. La performance diagnostique du tilt test est faible. Son intérêt peut aussi être d’ordre psychologique, il rassure le patient et sa famille en reproduisant les symptômes qui étaient inexpliquées. L’exploration électrophysiologique chez ces patients est inutile. La physiopathologie de la syncope vagale est mal comprise. Une augmentation des récepteurs muscariniques est suspectée. L’origine héréditaire fait l’objet de recherche intense avec mise en évidence de mutations génétiques pouvant être à l’origine de la prédisposition aux syncopes vasovagales. Le traitement peut être difficile, une adaptation des activités physiques est recommandée quand les syncopes sont associées à un stress excessif. Les manœuvres dites contre-vagales sont enseignées(4-8). Un traitement parasympathicolytique (atropine-like) est rarement indiqué. L’implantation d’un pacemaker a été retenue chez notre seconde patiente devant la répétition des syncopes et les antécédents de chirurgie cardiaque associés aux pauses sinusales per-critique. Le traitement par stimulation cardiaque de patients jeunes souffrant d’hypervagotonie n’est pas bien établi. Quelques cas sont rapportés dans la littérature chez des patients avec syncopes itératives invalidantes(4). Le stimulateur sans sondes pourrait avoir une place dans cette indication.  

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