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ORL et Stomatologie

Publié le 15 aoû 2016Lecture 8 min

Troubles respiratoires obstructifs du sommeil de l’enfant : le point de vue de l’ORL

H.GIRSCHIG, Saint-Martin-Boulogne

L’ORL est souvent sollicité en première ou en seconde intention dans les troubles respiratoires obstructifs du sommeil (TROS) de l’enfant car, dans un grand nombre de cas, il existe une hypertrophie du tissu immunocompétent de l’anneau de Waldeyer, causale ou associée. Devant cette demande clinique, souvent formulée par les parents, qui ont constaté une mauvaise qualité de sommeil, il nous appartient de détecter les enfants qui présentent un trouble du sommeil susceptible d’avoir des conséquences sur le développement pour proposer une prise en charge thérapeutique adaptée.

Les outils diagnostiques La symptomatologie clinique permet une approche primordiale et, en pratique, c’est souvent sur la clinique seule que repose le protocole thérapeutique. Cette attitude est discutée. De nombreuses études tentent de confirmer la valeur de la clinique ou, au contraire, d’en déterminer les limites(1). Pour l'instant, ces travaux n’ont pas permis d’établir un arbre décisionnel incontestable comme l’indique d’ailleurs l’important document publié par la HAS(2). On peut lire à la page 8 : « le diagnostic est clinique », mais il est également précisé : « documenté par une polysomnographie dans les recommandations les plus récentes ». La symptomatologie clinique évocatrice repose sur l’association d’un ronflement, d’un sommeil agité et peu réparateur, d’une croissance lente avec inappétence, d’une transpiration nocturne, et parfois, d’une difficulté à l’acquisition de la propreté nocturne. C’est parfois une obésité qui motive cette recherche, obésité cause ou conséquence du TROS. La recherche du site obstructif est au cœur de la démarche diagnostique et thérapeutique. Il est plus univoque chez l’enfant que chez l’adulte, si on écarte les syndromes polymalformatifs cervico-faciaux ou neurologiques, qui ne sont pas l’objet de cette mise au point. L’analyse des voies respiratoires vérifie la perméabilité nasale. Une luxation septale, possiblement d’origine obstétricale, est facilement reconnue. Une obstruction postérieure par une déformation de la cloison nasale est beaucoup plus rare, mais on découvre parfois tardivement une choane étroite unilatérale, il faut donc savoir recourir à l’examen fibroscopique nasopharyngé. Il peut également exister une obstruction des fosses nasales par une hypertrophie de cornet. Elle est fréquente en cas d’allergie associée, qu’il faut systématiquement rechercher dans cette situation. Cet examen permet de visualiser facilement le volume adénoïdien, et il est souvent possible de mettre en évidence une hypertrophie adénoïdienne par le simple examen oropharyngé, si celle-ci est importante (figure 1). Malgré ses limites, la radiographie de cavum de profil peut être utile dans certains cas. L’examen oropharyngé doit être réalisé avec un bon éclairage en commençant par l’examen bouche ouverte sans abaisse-langue et sans protraction linguale. En effet, le recours d’emblée à l’abaisse-langue entraîne souvent une contraction des muscles pharyngés, qui fausse l’évaluation du volume amygdalien (figure 2).   Ensuite, il faut utiliser l’abaisse-langue qui permet de visualiser un éventuel prolongement inférieur des amygdales, parfois important et obstructif lors du relâchement du sommeil. Ce temps d’examen permet de bien visualiser le voile du palais. Il est important de noter une brièveté du voile, une hypotonie souvent associée à une division réelle ou sous-muqueuse, qui doit être considéré de manière tout à fait rigoureuse si on s’oriente vers une adénoïdectomie. L’examen du larynx est rendu difficile s’il y a une hypertrophie amygdalienne importante. Mais en général une pathologie laryngée responsable d’apnée aura été reconnue dès les premières heures de vie et sort de notre cadre (forme sévère de laryngomalacie, malformation). Au moindre doute concernant le larynx, l’examen par fibroscopie nasolaryngée est indispensable.   Indications thérapeutiques Plusieurs situations pratiques sont possibles. Situation simple Au terme de cet examen clinique, devant l’existence d’une symptomatologie fonctionnelle franche, si une obstruction nette des VADS a été mise en évidence de façon incontestable, il paraît raisonnable de proposer une prise en charge thérapeutique ORL différente selon que l’obstruction est nasopharyngée (végétations) ou oropharyngée (amygdales). • Dans le cas où l’obstruction est exclusivement nasopharyngée, un traitement médical peut être proposé dans un premier temps. Il repose sur des pulvérisations nasales de corticoïde. Plus récemment, on a considéré l’intérêt d’associer le montélukast. Les nasocorticoïdes doivent être utilisés en précisant aux parents de pulvériser le médicament sans demander à l’enfant d’inspiration profonde. En effet, cela entraînerait la diffusion du médicament à tout l’arbre respiratoire en diminuant la concentration nasopharyngée et donc l’efficacité. Par ailleurs, il faut éviter de pulvériser vers la cloison nasale ce qui favorise les phénomènes d’épistaxis, qui sont le principal effet indésirable de ce traitement(3). On propose ce traitement pendant 2 mois avant une nouvelle évaluation. En cas d’efficacité insuffisante, on peut introduire le montélukast pour 1 ou 2 mois, suivi d’une nouvelle évaluation clinique. En cas d’échec de ce traitement médical, il devient utile d’envisager une adénoïdectomie. • Dans le cas où l’obstruction est oropharyngée ou mixte, c’est l’hypertrophie amygdalienne qui est en cause et il n’y a pas de traitement médical réellement efficace. Mais en toute circonstance, il faut garder à l’esprit qu’il y a un grand nombre de syndromes d’apnée obstructive du sommeil de l’enfant qui évoluent spontanément vers la guérison dans l’année qui suit(4). On propose alors de réaliser une amygdalectomie associée à l’adénoïdectomie(5). Mais, depuis quelques années, on s’est orienté de plus en plus vers une ablation partielle des amygdales. La discussion sur la technique opératoire n’a toutefois pas sa place ici. L’objectif est triple par comparaison avec l’amygdalectomie totale. Il est premièrement utile de conserver une partie du tissu amygdalien immunocompétent, deuxièmement de réaliser un geste dont les risques d’hémorragie semblent moindres, enfin et surtout peut-être de proposer un traitement quasi indolore (figures 3 et 4).   Certains associent une turbinectomie partielle lorsque les cornets sont hypertrophiés. Ce geste doit être considéré avec beaucoup de prudence et l’indication très soigneusement posée en raison de potentielles complications immédiates et surtout tardives (rhinites atrophiques).   Situations cliniques moins simples Ces situations sont liées à une symptomatologie clinique moins franche, ou à une identification du site obstructif et de son caractère complet ou partiel, qui peinent à être déterminés. Dans ce cas, le recours à l’endoscope nasopharyngé est indispensable, c’est le seul moyen de bien visualiser la partie choanale de l’hypertrophie adénoïdienne. L’intérêt de la radiographie de cavum de profil est discuté, il n’est certainement pas nul et reste l’examen de référence pour un certain nombre d’études, notamment nordaméricaines. Cette situation devrait conduire aussi à un enregistrement de sommeil. L’accès au laboratoire de sommeil pédiatrique reste très souvent difficile, mais il ne fait pas de doute qu’il s’améliorera rapidement. Cette difficulté d’accès a entraîné le développement de techniques de diagnostic objectif alternatives, dites de dépistage. Leur intérêt est discuté et il ne paraît pas possible de promouvoir de façon incontestable une technique par rapport aux autres (vidéo de sommeil, oxymétrie de sommeil, polysomnographie de sieste, etc.). Un enregistrement de sommeil est indispensable lorsqu’il existe des comorbidités, qu’elles entraînent un doute diagnostique ou une augmentation du risque opératoire. L’obésité incite notamment à beaucoup de prudence dans ce cadre. Elle est, en effet, associée à une diminution significative du taux de succès de l’intervention. Les études d’évaluation des résultats de cette chirurgie de désobstruction des voies aérodigestives de l’enfant montrent une amélioration importante qui correspond bien à l’impression clinique. Une cohorte de 610 enfants ayant bénéficié d’un enregistrement préopératoire pathologique ont pu bénéficier d’un contrôle polysomnographique postopératoire. Près de 80 % d’entre eux avaient un index < 5. Les facteurs de mauvais pronostic sont les comorbidités, notamment l’obésité, l’asthme et la sévérité préopératoire, ce qui ne surprend pas les médecins ORL habitués à prendre en charge les adultes pour la même pathologie.

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