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Profession, Société

Publié le 05 mai 2017Lecture 4 min

Pour une prévention en orthodontie

Patrick FELLUS, président de la Société française d’orthodontie pédiatrique ; ancien attaché consultant à l’hôpital Robert-Debré, Paris

Au moment où la recherche d’économies monopolise l’esprit des décideurs, notamment dans le domaine des dépenses de santé publique, ne devons-nous pas envisager de favoriser énergiquement les actes de prévention et en particulier pour l’orthodontie ? Dans les années 1970, l’Union française de santé bucco-dentaire avait initié, avec un succès dépassant largement ses espérances, l’éradication de la carie chez l’enfant. Il est sans doute possible de faire de même avec les traitements orthodontiques. En effet, près de 50 % des adolescents sont en cours de traitement ou mériteraient de l’être.

Il est donc impératif de ne pas s’arrêter à un traitement symptomatique et de comprendre comment les dysmorphoses se sont constituées et d’en supprimer les causes. La plupart des déformations que les orthodontistes sont amenés à traiter sont, quel que soit l’âge, le résultat d’un déséquilibre entre les forces de la musculature faciale et celles de la langue lors de la déglutition, mais plus encore en posture. Éviter que les déformations apparaissent La succion/déglutition est une fonction qui se met en place très tôt, in utero, au niveau du tronc cérébral et qui va gérer les fonctions nutritionnelles durant les premières années de la vie. Quand la mastication unilatérale alternée apparaît, entre 3 et 4 ans, un nouveau mode de déglutition se met en place : la déglutition de type sujet denté. À l’âge de 4 ans, 60 % des enfants auront adopté spontanément, par voie sous-corticale, ce nouveau mode de fonctionnement qui favorisera une croissance eumorphique. Ainsi, 50 % d’entre eux n’auront jamais besoin d’un traitement orthodontique. Faciliter ce passage naturel permettra de diminuer l’installation d’une dysmorphose, et c’est pour cela qu’il est impératif de supprimer l’usage de la tétine à 1 an, le biberon à 2 ans et de veiller à ce que les aliments soient progressivement plus compacts pour entraîner la mastication. Éviter que les malformations ne s’aggravent La Haute Autorité de santé a demandé à ce que la première consultation de dépistage ait lieu avant 6 ans et a défini toute une pathologie qui devait être traitée en denture temporaire. Ce type de traitement s’adresse plus aux structures osseuses qu’aux dents elles-mêmes, et comprend à la fois des dispositifs mécaniques et une rééducation fonctionnelle. La durée du traitement est alors considérablement réduite, même si une seconde phase, vers 10 ans, est parfois nécessaire pour parfaire l’alignement dentaire. Éviter les récidives après correction Commencé plus tardivement, une fois toutes les dents définitives poussées, le traitement ne devra pas non plus rester symptomatique. Si les causes n’ont pas été traitées, la stabilité des résultats ne peut être garantie. Quel que soit le mode de traitement, la rééducation de la déglutition est donc un impératif du traitement orthodontique. De quels moyens dispose-t-on ? Le plus classique reste le recours à l’orthophonie ou à la kinésithérapie. Par des exercices gérés au niveau cortical, il faut que l’enfant prenne conscience des gestes qu’il effectue habituellement puis de ceux qu’il doit effectuer, la répétition devant permettre l’automatisation. Sachant que les rééducatrices les plus chevronnées avouent elles-mêmes que ce travail est long et difficile. Eric Kandel, prix Nobel de médecine en 2000 pour ses travaux sur la mémoire, a montré que dans ce cas on avait une augmentation des neurotransmetteurs au niveau des synapses. Nous sommes dans la mémoire à court terme, qui pourra se transformer en mémoire à long terme, par la répétition, par un dialogue entre la synapse et le noyau cellulaire, convertissant les protéines CPEB en prions. Lorsque ce travail se fait naturellement, vers l’âge de 4 ans, par voie sous-corticale, de nouvelles synapses se créent, ainsi qu’un nouveau circuit. Froggy Mouth® est un nouveau dispositif qui, porté 15 minutes par jour devant un écran de télévision (récompense reconnue par le système limbique) et durant quelques semaines, va obliger l’enfant à découvrir un  nouveau mode de déglutition par voie sous-corticale. En effet, ne pouvant plus serrer les lèvres, il sera dans l’impossibilité d’avaler en succion, d’où une réaction immédiate au niveau du tronc cérébral : trouver un nouveau programme de déglutition en créant un nouveau circuit neuronal. L’engrammation est très rapide et l’automatisation de ce nouveau programme est alors géré par la détente de la musculature labiale.

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