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Nutrition

Publié le 16 sep 2009Lecture 11 min

Le Programme national Nutrition Santé (PNNS) et l’enfant : les résultats 8 ans après

M. VIDAILHET1, J.-P. GIRARDET2, D. TURCK3 1 Service de Pédiatrie, Hôpital d’enfants, CHU de Nancy 2 Service de Gastro-entérologie et nutrition pédiatriques, Hôpital Trousseau, Paris 3 Département de Pédiatrie, Hôpital Jeanne-de-Flandre, Lille

Le PNNS (Programme national Nutrition Santé) est un plan de santé publique mis en place en 2001 par le ministère de la Santé avec la participation de cinq autres ministères. Il vise à améliorer la santé de la population, en particulier vis-à-vis de l’obésité, des maladies cardiovasculaires et des cancers en s’appuyant sur un facteur déterminant, la nutrition qui comporte deux éléments indissociables : l’alimentation et l’activité physique. Nous envisagerons les actions entreprises lors de sa première étape, le PNNS 1 (2001-2006), avant d’indiquer les orientations de sa poursuite, par le PNNS 2 (2006-2010). 

 
Objectifs du PNNS 1 Une majorité des objectifs du PNNS concernent directement ou indirectement les enfants et les adolescents. C’est le cas de 7 des 9 objectifs prioritaires : • Augmenter la consommation de fruits et légumes (en diminuant le nombre de petits consommateurs de 25 %). • Augmenter les apports de calcium en diminuant d’au moins 25 % les personnes ayant des apports inférieurs aux apports nutritionnels conseillés (ANC). • Diminuer d’au moins 25 % la prévalence du déficit en vitamine D. • Diminuer la consommation de lipides à moins de 35 % de l’apport énergétique total (AET), celle des acides gras saturés (AGS) d’au moins 25 %, pour atteindre moins de 35 % des acides gras totaux (AGT). • Augmenter les glucides jusqu’à plus de 50 % de l’AET, en favorisant les aliments source d’amidon tout en réduisant les sucres simples de 25 % et en augmentant les fibres de 50 %. • Diminuer la consommation d’alcool (problème de l’alcoolisation des adolescents). • Interrompre l’augmentation de prévalence de l’obésité chez l’enfant. Augmenter l’activité physique quotidienne et combattre la sédentarité. C’est aussi le cas de 6 des 9 objectifs spécifiques : • Diminuer la prévalence de l’anémie ferriprive pendant la grossesse. Améliorer le statut en folates des femmes en âge de procréer (prévention du spina bifida). Réduire à moins de 2 % la prévalence de l’anémie ferriprive de 6 mois à 2 ans et à moins de 1,5 % de 2 à 4 ans. • Promouvoir l’allaitement maternel. • Améliorer les statuts en fer, calcium, vitamine D, des enfants et adolescents. Prévenir les déficits vitaminiques et minéraux dans les populations en précarité. • Protéger les personnes qui suivent des régimes restrictifs des déficits nutritionnels. • Prendre en charge les troubles du comportement alimentaire (TCA). • Prendre en compte les problèmes d’allergie alimentaire.   Actions du PNNS 1 Les actions entreprises par le PNNS 1 ont été nombreuses tant au niveau national que régional, départemental et municipal. Au niveau national   Édition. Plusieurs documents d’information édités concernent l’enfant : – « La santé vient en mangeant et en bougeant » ; – « Guide de nutrition de l’adolescent » ; – « Allaitement maternel : les bénéfices pour la santé » ; – « Guide de nutrition pendant et après la grossesse (2007) » ; – « Activité physique et obésité de l’enfant (2008) » ; – Une « Lettre d’actualité périodique (18 numéros parus) ».     Information. Des campagnes nationales d’information ont été menées : – « Consommation de fruits et légumes » ; – « Promotion de l’activité physique et sportive » ; – « Limitation des aliments gras, salés, sucrés et des boissons sucrées ».     Éducation, législation et réglementation. Des mesures visant à éduquer l’enfant et à créer un environnement favorable sur les plans de l’alimentation et de l’activité physique ont été mises en place, débouchant parfois sur la publication de textes législatifs et réglementaires : – composition des repas en restauration scolaire (circulaire de juin 2001 sur la restauration scolaire ; cahier des charges pour les acheteurs publics de denrées alimentaires) ; – lutte contre le grignotage et suppression de la collation matinale à l’école (circulaire ministérielle sur la collation matinale à l’école du 25/03/2004) ; – développement de la nutrition dans les programmes scolaires. – interdiction des distributeurs de boissons, de produits de grignotage et installation de fontaines d’eau fraîche dans les écoles (amendement interdisant les distributeurs de produits gras, sucrés, salés dans les enceintes scolaires (loi de santé publique du 29/06/2004). – décret et arrêté du 28/02/2007 introduisant les messages santé devant accompagner ou suivre toute publicité sur les aliments.     Projets. Un programme d’appel à projets a été lancé en 2002, 2003 et 2004 : Il a donné lieu à une mobilisation nationale, avec soumission de milliers de projets, dont 151 ont été retenus et financés : 91 d’entre eux concernaient uniquement l’enfant et 26 l’incluaient, soit un total de 80 % des projets l’impliquant.     Internet. Deux sites internet ont été créés : – celui du ministère de la Santé ( www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/nutrition/sommaire.htm) apportant les données actualisées sur le programme, dont le rapport du Pr Serge Hercberg, président du Comité de pilotage du PNNS (dans la rubrique « Présentation des actions et réalisations » le point « Mission 4.3.1.4 ») ; – et celui de l’INPES, très convivial, destiné aux familles (www.mangerbouger.fr).     Logo. Un logo « PNNS » a été créé, permettant de valoriser les actions, mesures, messages, outils mis en place par des structures publiques ou privées, dont les opérateurs économiques, et allant dans le sens du PNNS.     Actions visant le système de soins : – développement des comités de liaison en alimentation et nutrition (CLAN) dans les établissements de soins. – création des réseaux « Ville- Hôpital », notamment pour la prise en charge de l’obésité de l’enfant ; – diffusion aux médecins et diététiciens de disques permettant l’évaluation rapide de l’indice de corpulence.   Aux niveaux régional, départemental et municipal D’emblée les régions (DRASS) ont été impliquées. Sur 23 régions, 18 ont répondu positivement et les rapports de 6 d’entre elles figurent sur le site du ministère, parmi lesquels celui de l’Aquitaine particulièrement active (www.nutritionenfantaquitaine.fr), dont le programme a reçu le prix de l’OMS en 2006. Ces actions sont poursuivies au niveau des conseils généraux et des municipalités, dont un grand nombre ont signé des chartes d’engagement. On peut citer en particulier le soutien aux réseaux « Ville-Hôpital » pour la prise en charge des obésités de l’enfant.   Évaluation Trois quarts des actions menées par le PNNS 1 ont fait l’objet d’évaluations (voir le rapport du Pr Serge Hercberg sur le site internet du ministère p 120-125). Perception des messages du PNNS Six enquêtes BVA ont été réalisées entre 2005 et 2007 : au-delà de 15 ans, 48 % des adolescents citent la recommandation « 5 fruits et légumes par jour », contre 36 % en 2005 ; entre 8 et 14 ans, 54 % connaissent ce repère, sans différence selon le niveau socioéconomique ; 71 % des adolescents estiment que les aliments du groupe « viande, oeuf, poisson » doivent être consommés 1 à 2 fois par jour. Les groupes les moins connus sont les produits laitiers (27 %) et le groupe « céréales, féculents ». Une forte majorité d’adolescents connaissent les messages santé du PNNS, dans leur principe et leur contenu et estiment leur mémorisation facile.   Évolution des consommations alimentaires Elle peut être appréciée par l’enquête sur les consommations alimentaires INCA 2 (2006-2007) comparativement à la précédente (INCA 1, 1998-1999) (www. afssa.fr ), et par l’enquête ENNS 2006 (www.invs.sante.fr). Nous ne retiendrons ici que les résultats à l’adolescence, période cruciale sur le plan nutritionnel.  Aspects positifs. On note une baisse de la consommation calorique (-10 %), alors qu’elle avait augmenté de 3 % entre 1994 et 1999 (enquête ASPCC). Il existe en particulier une baisse de la consommation des « sucres, viennoiseries et pâtisseries» (SV&P), de 27 % pour les sucres et dérivés, et une augmentation des fruits et légumes (19 % entre 11 et 14 ans ; 12 % entre 15 et 17 ans) ; mais 40 % seulement des adolescents atteignent les 3,5 portions journalières (280 g), soit le minimum souhaité. Malgré une diminution de la consommation calorique, les apports lipidiques et glucidiques restent excessifs.     Aspects négatifs ou insuffisants. • Les apports lipidiques (AL) restent excessifs : 29 % des 11-14 ans par exemple ont encore des AL supérieurs à 40 % de l’AET ; pour 60 %, les apports restent supérieurs à 35 % de l’AET ; 3 fois sur 4, les AGS dépassent 35 % des AGT. • Apports glucidiques. S’il existe une diminution des SV&P, plus de 45 % des adolescents ont encore des apports en sucres excessifs, supérieurs à 12,5 % de l’AET. Un tiers d’entre eux consomme plus de 125 ml/j de boissons sucrées. • Calcium et produits laitiers. La situation est particulièrement préoccupante : la consommation de produits laitiers, déjà insuffisante, chute de 13 % entre 11 et 14 ans et de 18 % entre 15 et 17 ans. La baisse porte surtout sur le lait lui-même et est plus marquée chez les filles. Les apports de calcium sont de ce fait très insuffisants, surtout chez celles-ci : 63 % d’entre elles entre 11 et 14 ans ont moins des deux tiers des ANC et 11 % des apports inférieurs au tiers des ANC. Entre 15 et 17 ans, ces pourcentages montent respectivement à 73 et 15,4 %. On conçoit l’inquiétude qui peut en résulter pour le statut minéral osseux et l’ostéoporose post-ménopausique. La baisse de consommation de produits laitiers est préoccupante, surtout chez les filles. • La consommation de sel est souvent excessive (30 % des plus de 15 ans dépassent 10 g/j) et la consommation de fibres souvent insuffisante : 74 % des filles et 60 % des garçons en consomment moins de 15 g/j entre 11 et 14 ans, ces pourcentages passant respectivement à 82,5 % et 58 % entre 15 et 17 ans. Ce défaut va de pair avec la consommation toujours insuffisante de fruits et de légumes. De même, on note toujours une consommation insuffisante de produits céréaliers et de féculents (70 % des filles et 50 % des garçons : moins de 3 portions/ j), avec une baisse portant surtout sur le pain et les produits de panification (chute de 11 % entre 11 et 14 ans depuis l’étude INCA 1).   Évolution de la situation nutritionnelle On dispose encore de peu de résultats, mais un objectif majeur a été atteint : la stabilisation du surpoids et de l’obésité chez l’enfant et l’adolescent. Elle est constatée dans les deux études INCA 1 et ENNS 2006. Cette stabilisation a été confirmée par d’autres études. Il n’est évidemment pas possible d’affirmer une relation de cause à effet entre la stabilisation de la prévalence du surpoids et de l’obésité et les messages du PNNS. On doit cependant constater que cette stabilisation est récente, qu’elle fait suite à de nombreuses années d’augmentation et qu’elle correspond à la mise en place du PNNS dont elle constitue un des objectifs prioritaires. La stabilisation récente de la prévalence du surpoids et de l’obésité correspond à la mise en place du PNNS. Prévalence de l’allaitement maternel Une enquête périnatale effectuée en 2003 révèle que la prévalence de l’allaitement, exclusif ou partiel, à la sortie de la maternité est en augmentation, passant de 52,5 % en 1998 à 62,5 % en 2003, celle de l’allaitement exclusif passant de 45 à 56 %. Ces résultats, encourageants, restent bien sûr insuffisants.   La poursuite du PNNS : le PNNS 2, 2006-2010 Ces résultats encourageants mais encore insuffisants ont amené à maintenir les objectifs du PNNS 1 en les renforçant grâce à des « plans d’action » dont trois concernent l’enfant et l’adolescent :   Plan 1 – Offrir à tous les conditions d’une alimentation et d’une activité physique favorables à la santé : • amélioration de l’offre alimentaire dans les établissements scolaires ; • augmentation de l’activité physique à l’école ; • développement des actions pédagogiques en nutrition.     Plan 2 – Renforcer le dépistage et la prise en charge de l’obésité infantile.     Plan 3 – Proposer des mesures destinées à des populations spécifiques : • engagement conventionnel des médecins dans la prévention chez les femmes enceintes (alcool, fer, iode, folates, sel, poids) ; • promotion de l’allaitement maternel ; • enfants des populations défavorisées ; • prévention et prise en charge des troubles du comportement alimentaire (TCA).   Conclusion Le PNNS a suscité une mobilisation remarquable de tous les acteurs impliqués dans l’éducation et la santé de l’enfant. Ses résultats sont déjà très apparents, alors qu’on peut estimer qu’il n’a atteint sa pleine efficacité qu’à partir de 2003-2004. Malgré les difficultés actuelles (crise économique, prix élevé des fruits et légumes), il faut poursuivre avec la même détermination les actions prévues. Une attention particulière doit être aujourd’hui portée sur les laits et laitages pour lesquels la situation s’est aggravée depuis 1999. Parmi les actions récentes, on peut citer en exemple la parution du guide « Activité physique chez les sujets en surcharge pondérale », la mise en place d’un chantier « Allaitement maternel » visant à proposer des actions concrètes pour son développement et l’opération « Un fruit pour la récré » lancée dans les écoles de quartier à Bordeaux en mai 2006 et qui devrait être étendue cette année grâce à une subvention de l’Union européenne.

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