Publié le 28 jan 2009Lecture 5 min
Quand initier une immunothérapie spécifique chez l’enfant allergique ?
Dr Ph.Bousquet
L’immunothérapie spécifique est actuellement considérée comme le seul traitement permettant de prévenir les symptômes allergiques. Ainsi, cette possible action préventive et son impact sur l’évolution naturelle des pathologies sont des arguments en faveur de son utilisation chez les enfants. La voie sous-cutanée a progressivement été remplacée par la voie sublinguale (SLIT – sublingual immunotherapy), en particulier chez les enfants. L’auteur de l’article propose une revue de la littérature en se focalisant particulièrement sur les publications récentes et rappelle les indications de la désensibilisation chez les enfants. Cette revue s’appuie sur une recherche à partir des bases de données Medline et Embase. Les essais randomisés et les revues de la littérature/ méta-analyses, publiés entre janvier 2007 et juillet 2008, ont été préférentiellement sélectionnés.
Rhinite allergique – essais randomisés et revue de la littérature Les essais réalisés chez l’enfant sont rares, en particulier pour la voie sous-cutanée. Une revue de la littérature et une méta-analyse concluent à une méthodologie pauvre de ces essais, l’efficacité n’ayant été retrouvée que dans une proportion limitée d’études. Les résultats pour l’immunothérapie sublinguale semblent également discordants. Cependant, une des méta-analyses les plus récentes montre que la SLIT, comparée au placebo, entraîne une réduction significative des symptômes et du recours aux médicaments de secours. Asthme allergique – essais randomisés et revue de la littérature Aucune étude récente sur l’immunothérapie sous-cutanée n’a été publiée. La dernière en date n’a pas mis en évidence d’efficacité. Toutefois, celle-ci portait sur une désensibilisation à mixture d’allergènes, immunothérapie depuis abandonnée. La littérature sur l’immunothérapie sublinguale est plus fournie. Une méta-analyse conduite à partir d’études publiées après 1990 a mis en évidence une efficacité de l’immunothérapie sur les symptômes et la consommation médicamenteuse. Toutefois, un essai randomisé publié à la suite de cette méta-analyse n’a pas permis d’observer une efficacité de la désensibilisation aux acariens. Asthme et rhinite – études épidémiologiques observationnelles Ces études observationnelles ont montré un effet de l’immunothérapie sur l’asthme et la rhinite allergique, sans toutefois pouvoir l’affirmer (absence d’imputabilité de ce type d’étude). Dermatite atopique La majorité des études portant sur la dermatite atopique et l’eczéma est de type observationnel. Une efficacité est supposée, sans toutefois être réellement mise en évidence. Perspectives dans l’asthme et la rhinite La place de l’immunothérapie sous-cutanée n’est pas clairement établie, l’efficacité ayant été apportée par certaines études randomisées de bonne qualité, sans pour autant qu’un consensus ne puisse être établi. De nouvelles études doivent être menées afin de confirmer cette hypothèse. L’immunothérapie sublinguale semble plus prometteuse au regard des résultats observés chez l’adulte. Les premiers résultats des «tablettes» sublinguales chez l’enfant tendent à mettre en évidence une efficacité. Prévention Un certain nombre d’études suggèrent une efficacité de l’immunothérapie permettant de prévenir la survenue de maladie allergique. Celle-ci a été rapportée 10 ans après une désensibilisation de 3 ans (étude Preventive Allergy Treatment). Deux études récentes confirment cette observation. Quand initier une immunothérapie chez un enfant présentant une maladie allergique ? Les recommandations de l’ARIA (Allergic Rhinitis and its Impact on Asthma) viennent d’être mises à jour. Les indications pour les enfants de plus de 5ans sont similaires à celles de l’adulte. Pour l’immunothérapie souscutanée : • patient présentant des symptômes induits majoritairement par une exposition allergénique ; • patient présentant des symptômes suite à une pollinisation prolongée ou une succession de saisons polliniques ; • patient présentant une rhinite et des symptômes touchant les voies respiratoires inférieures durant le pic d’exposition pollinique ; • patient ne souhaitant pas prendre un traitement au long cours ; • patient présentant des effets secondaires non négligeables avec les autres thérapeutiques. Pour l’immunothérapie sublinguale : • patient présentant une rhinite, une conjonctivite ou un asthme induit par les pollens ou les acariens ; • patient insuffisamment contrôlé par un traitement classique ; • patient ayant présenté une réaction systémique lors d’une désensibilisation injectable ; • patient peu compliant ou refusant l’immunothérapie injectable. En conclusion, l’immunothérapie spécifique chez les enfants ayant une rhinite allergique prévient le développement d’un asthme et l’apparition de nouvelles sensibilisations. Les résultats des études sont en faveur d’une immunothérapie spécifique précoce, même chez les enfants bien contrôlés par les traitements symptomatiques.
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