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Dermatologie

Publié le 25 mar 2024Lecture 7 min

Gros plan sur les Journées Dermatologiques de Paris

Catherine FABER, Saint-Mandé

Les Journées Dermatologiques de Paris (JDP) se sont tenues du 5 au 9 décembre dernier au Palais des congrès de Paris. Dans ce congrès de dermatologie générale, notre envoyée spéciale, Catherine FABER, a su identifier quelques communications d’intérêt pour les pédiatres.

Modifier l’histoire naturelle des dermatoses inflammatoires ?   Les données d’une cohorte américaine de 218 425 enfants de 0 à 18 ans suivis pendant plus de 5 ans ont permis de préciser l’incidence de la dermatite atopique (DA) selon l’âge(1). Elles montrent qu’1 enfant sur 10 va développer une DA, avec un pic d’incidence à l’âge de 4 mois, et que cette dermatose est la maladie atopique qui survient le plus précocement dans la vie. Elles mettent également en lumière la fréquence des comorbidités associées : 1 enfant sur 2 atteint de DA présente au moins une autre manifestation atopique et 1 sur 4 deux ou plus. Des facteurs prédictifs de survenue d’une DA chez l’enfant ont été identifiés par une étude sud coréenne fondée sur la réalisation de tape strips à l’âge de 2 mois, le recueil de l’histoire familiale de DA et la mesure du taux d’incidence de la maladie à 2 ans(2). Elle révèle qu’un antécédent familial de DA, mais aussi l’augmentation de la TSLP (thymic stromal lymphopoietin) et de l’IL-13, la baisse de certains céramides et l’augmentation de la sphingomyéline sont associés à un risque élevé de DA. Ces marqueurs ont un effet cumulatif : leur association confère un risque relatif de DA de 54. Ces données nécessitent d’être confirmées dans une autre population. En termes de prévention primaire, l’efficacité de l’application précoce d’émollients chez les enfants à risque n’est toujours pas prouvée. Si l’étude STOP-AD retrouve un effet positif à l’âge de 1 an sur la réduction de la fréquence de la DA(3), les résultats à 5 ans de l’étude BEEP sont négatifs tant pour la DA que pour les autres pathologies atopiques(4). En ce qui concerne la prévention secondaire, il a été montré qu’un contrôle précoce et strict de l’inflammation cutanée réduit le risque de survenue d’allergie alimentaire chez les enfants atteints de DA(5). Cependant, le protocole utilisé pour obtenir ce résultat n’est pas applicable en pratique courante (application des dermocorticoïdes sur le corps entier). Par ailleurs, dans une étude menée aux Pays-Bas, 24 % des enfants atteints de psoriasis peu sévère au moment de l’inclusion ont développé une forme sévère(6). Les facteurs de risque cliniques d’évolution vers un psoriasis sévère sont le sexe masculin, la présence de psoriasis sur le cuir chevelu, sur l’ongle ou une obésité. Il est important d’identifier ces enfants afin d’éviter l’inertie thérapeutique, qui est un phénomène fréquent dans le psoriasis pédiatrique. Des études en cours évaluent l’effet potentiel d’une intervention précoce sur l’évolution de cette pathologie.   Progrès en génétique   Des publications intéressantes sur l’apport des analyses génétiques méritent également d’être rapportées. La première maladie génétique impliquant un variant sur un gène des kallikréines (KLK), qui jouent un rôle important dans le processus de différenciation terminale de l’épiderme, vient d’être identifiée(7). Ce variant est associé à une diminution de l’activité protéasique des KLK, notamment de la KLK11. Le phénotype particulier des patients se caractérise par un début néonatal, un trouble de la kératinisation avec des lésions érythémateuses squameuses en larges plaques pigmentées, et une kératodermie palmoplantaire témoignant du retard de desquamation. Deux autres nouveautés concernent les maladies dysimmunitaires avec manifestations atopiques primitives (Primary atopic disorders : PADs). La première est l’identification d’une maladie associée à une mutation gain de fonction pour le gène STAT6 qui est impliqué dans la transduction du signal de l’IL-4(8). Les patients porteurs de cette mutation ont des maladies atopiques sévères associant DA, allergies alimentaires multiples, asthme, avec anaphylaxie fréquente, et infections cutanées peu sévères. Certains d’entre eux ont développé un lymphome B. Une seconde étude décrit des patients chez lesquels un variant gain de fonction pour le même gène a été identifié(9). Ils ont présenté de façon précoce des maladies atopiques, une diarrhée chronique, des calcifications cutanées et des arthralgies. Il existe aussi une maladie dysimmunitaire liée à une mutation activatrice de JAK-1, qui est impliqué dans la transmission du signal de cytokines inflammatoires, dont l’IL-4. Une troisième équipe a évalué l’efficacité des inhibiteurs de JAK (iJAK) dans ce type de pathologie(10). Le traitement par baricitinib, un iJAK-1/2, a permis d’améliorer les symptômes, mais la réponse thérapeutique avec l’upadacitinib, iJAK-1, était moins bonne. Ce constat illustre la complexité du processus inflammatoire dans les PADs. Un repositionnement des biothérapies a aussi été testé dans une série de 9 cas de syndrome de Netherton(11). Après une amélioration initiale, 8 patients ont arrêté le traitement par manque d’efficacité. Les séries de cas avec un suivi trop court ne permettent pas d’appréhender de façon fiable la réponse thérapeutique. Il est donc urgent de développer une méthodologie d’évaluation adaptée pour évaluer le repositionnement des différentes biothérapies dans les génodermatoses. Considérée comme la révolution des dernières années, la thérapie génique topique est déjà autorisée aux États-Unis et le sera très prochainement en France dans le traitement de l’épidermolyse bulleuse dystrophique (EBD). Une étude de phase 3 a montré que cette thérapie utilisant un vecteur viral (Herpes simplex) permet de restaurer l’expression du collagène 7A1 et d’obtenir un taux de cicatrisation de 67 % versus 22 % sous placebo avec une bonne tolérance(12). L’utilisation du virus herpès comme vecteur de thérapie génique topique est en cours de développement pour d’autres génodermatoses. La rémanence clinique de l’intervention observée chez un patient qui avait arrêté le traitement 17 mois suggère qu’elle pourrait modifier le cours évolutif de l’EBD. L’utilisation du HSV comme vecteur de thérapie génique topique est en cours de développement pour d’autres génodermatoses.   Publications utiles pour la pratique clinique   Dans les hémangiomes infantiles (HI), le traitement de référence est le propanolol. La capacité de ce médicament lipophile à traverser la barrière hémato-encéphalique a suscité une inquiétude sur d’éventuels effets sur le développement cognitif des enfants. Une étude menée aux Pays-Bas, où l’aténolol est prescrit en première intention dans les HI, donne des résultats rassurants(13). La comparaison des fonctions cognitives des enfants traités par aténolol ou par propanolol, qui étaient âgés en moyenne de 7,4 ans au moment de l’évaluation, ne montre pas de différence significative entre les deux groupes. Bien que le syndrome de KasabachMerritt (SKM) soit rare, il est intéressant de prendre connaissance des données de la plus grande série rapportée à ce jour (n = 338 patients)(14). Elles ont permis d’identifier des facteurs de risque de survenue de cette complication sévère de l’hémangio-endothéliome kaposiforme. L’âge d’apparition inférieur à 4,75 mois, la taille de la lésion supérieure à 5,35 cm, les formes mixtes ou profondes ainsi que la localisation médiastinale ou rétropéritonéale sont associées à un risque plus élevé de SKM, avec un effet cumulatif. Durant l’épidémie de mpox (infection à Monkeypox virus), qui a sévit en 2022, très peu de cas pédiatriques ont été rapportés dans la littérature. D’où l’intérêt de la description par une équipe de Fréjus de deux cas à transmission intrafamiliale survenus pendant cette période chez des enfants âgés de 4 et de 7 ans(15). Ces jeunes patients avaient des lésions élémentaires peu nombreuses, papulopustuleuses, sur base érythémateuse. La présentation clinique de l’infection est différente de celle de la varicelle. Le lien épidémiologique avec un cas confirmé ou suspect constitue un élément clé du diagnostic. Une autre publication française concerne l’arthrite juvénile idiopathique (maladie de Still)(16) dont les manifestations cutanées classiques sont l’exanthème maculopapuleux transitoire, l’érythème flagellé fixe et l’éruption urticarienne. Elle rapporte des manifestations cutanées atypiques comme des lésions érythématosquameuses, une atteinte des paupières, une atteinte dermatomyosite-like, des lésions dyschromiques, un érythème pouvant être fixe. Il n’y a pas de différence de signes cliniques non dermatologiques en fonction de la présentation dermatologique de la maladie. En revanche, un syndrome inflammatoire plus élevé a été observé chez les enfants avec signes cutanés atypiques. Ces derniers ont un risque plus élevé d’échec du traitement de première ligne (AINS ou corticothérapie orale) et de survenue d’un syndrome d’activation macrophagique. En présence de signes cutanés atypiques, il faut donc envisager une introduction précoce d’un traitement biologique en cas de non-réponse au traitement de première ligne. Enfin, une étude rétrospective monocentrique américaine a montré que la photothérapie UVB est bien tolérée chez les enfants traités pour vitiligo(17). Elle a été réalisée au cabinet ou à domicile, comme c’est souvent le cas aux États-Unis. Le taux d’érythème solaire était de 29 % (7,9 % pour les traitements à domicile), mais la photothérapie UVB était efficace. Les patients qui en ont bénéficié avaient en effet 6,3 fois plus de chances d’être améliorés ou guéris.

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