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Allergologie - Immunologie

Publié le 25 oct 2023Lecture 6 min

Allergies aux animaux domestiques : quels conseils donner ?

Ania CARSIN, service de pneumologie et allergologie pédiatriques, Hôpital Saint-Joseph, Pôle Parents-Enfants, Marseille

Pour deux tiers des Français, les animaux domestiques font entièrement partie de la famille et plus d’un foyer sur deux en possède un. Les effets bénéfiques de vivre avec un animal sont décrits dans le développement socio-émotionnel des enfants, les relations sociales et même en tant que facteur protecteur des maladies cardiovasculaires. Les animaux, notamment les chats, représentent la 3e cause d’allergie respiratoire après les acariens et les pollens. Nous allons voir les conseils que l’on peut donner pour l’acquisition ou non d’un animal, les signes respiratoires orientant vers une allergie à ce dernier avec la nécessité de confirmation par les tests allergologiques, et la difficulté de l’éviction des allergènes ubiquitaires. Enfin, les traitements symptomatiques conseillés et l’intérêt d’une immunothérapie allergénique.

L’acquisition d’un animal : les premières années de vie prévient-elle l’apparition d’une allergie ?   Plusieurs études épidémiologiques ont montré qu’avoir un chien au domicile dans les premières années de vie de l’enfant, avait un effet protecteur primaire sur l’apparition des allergies et de l’asthme. Il existe encore des données contradictoires concernant la garde des chats ou d’autres animaux de compagnie typiques. On peut donc conseiller l’acquisition d’un chien à des parents qui attendent un bébé avec un possible effet bénéfique protecteur sur l’allergie. Pour l’acquisition d’un chat, la réponse doit être guidée en fonction du terrain atopique familial et personnel de l’enfant. Pour les familles sans risque accru d’allergies, la garde de chats ne devrait pas être limitée pour des raisons de prévention primaire des allergies. Les familles présentant un risque accru d’allergies ou ayant des enfants atteints d’eczéma atopique préexistant ne doivent pas commencer à acquérir un chat. Concernant les animaux de compagnie autres que les chats et les chiens, aucune recommandation ne peut être faite sur la prévention primaire d’allergies et d’asthme (figure). Figure. Conseils d’acquisition d’un animal en prévention en fonction de l’animal et du terrain atopique pour le chat d’après M. V Kopp (voir Pour en savoir plus)   Est-ce une allergie aux poils d’animaux ou aux animaux à poils ?   Les poils ne sont pas allergisants, ce sont les protéines sécrétées par l’animal : les allergènes peuvent être retrouvés dans les squames, les poils et les sécrétions (salive, urine ou larmes).   Quels sont les signes cliniques qui font suspecter une allergie aux animaux à poils ? Il s’agit principalement des entités cliniques classiques de l’allergie respiratoire : la rhinite, la conjonctivite et l’asthme. La rhinite allergique est caractérisée par une rhinorrhée claire associée à un prurit nasal ou palatin (parfois des oreilles), une obstruction nasale, des éternuements en salve éventuellement associés à une conjonctivite (larmoiement, érythème conjonctival, prurit oculaire). Les enfants allergiques peuvent également présenter une asthénie et des troubles du sommeil. Des symptômes cutanés à type d’urticaire sont également décrits. L’asthme est également présent, on peut retenir que la moitié des patients allergiques au cheval présente un asthme. Les signes cliniques sont toujours liés à une exposition qui peut être direct (contact direct avec l’animal) ou indirect ou « par procuration » (contact avec les allergènes présents dans l’entourage de l’enfant : proches ou mobilier, vêtements, etc.).   Comment fait-on le diagnostic d’une allergie aux animaux à poils ? La démarche diagnostique est celle des allergies IgE-médiées : le diagnostic est confirmé par l’existence de signes cliniques en présence de l’animal avec la mise en évidence d’une sensibilisation (prick-tests positifs ou IgE spécifiques positives : IgE anti-chat, IgE anti-chien, IgE anti-cheval). Il faut noter que les allergiques possèdent autant d’animaux que les non-allergiques, et qu’un tiers des patients allergiques au chat n’ont pas de chat au domicile. La présence de l’allergène est parfois difficile à mettre en évidence.   Quelles sont les mesures de prise en charge de l’allergie ?   Comme pour toute allergie, les mesures à prendre sont l’éviction de l’animal, la limitation de l’exposition, le traitement symptomatique et, dans certains cas, la discussion pour la mise en place d’une immunothérapie allergénique.   L’éviction de l’animal : quelles sont les limites ? L’éviction de l’animal est à réaliser le plus tôt possible dans l’histoire naturelle de la maladie, il s’agit du traitement de référence mais cette mesure est difficilement réalisée dans les familles devant l’impact émotionnel important de la séparation avec l’animal. Par ailleurs, une fois l’éviction réalisée, Fel d 1, l’allergène majeur du chat, est encore retrouvé six mois plus tard au domicile ! L’éviction peut être également difficile car les allergènes peuvent être présents dans différents endroits (école, crèche, bureaux, cinémas, avions, hôpitaux, logements) via les vêtements surtout en laine, dans l’air ou même les cheveux (surtout des propriétaires de chats mais aussi de personnes non exposées directement).   Comment limiter l’exposition aux allergènes des animaux ? Si l’animal est toujours au domicile il faut limiter l’accès à l’intérieur du domicile, particulièrement dans la chambre à coucher et éviter le contact avec les litières. Certains préconisent un lavage régulier de l’animal une à deux fois par semaine en fonction de la tolérance. Pour limiter l’exposition indirecte, il faut que l’enfant et l’entourage changent de vêtements après avoir été exposés directement à l’animal. Les animaux hypoallergéniques (vendus à des prix très élevés), notamment pour les chats, n’ont pas montré d’efficacité dans les études sur les symptômes allergiques. Il n’est pas non plus conseillé de recommander les croquettes pour chats contenant des anticorps anti-Fel d 1 qui semblent attrayantes dans la démarche (traiter le chat pour éviter les symptômes chez les patients).   Quel est le traitement symptomatique ? Le lavage oculaire et nasal est recommandé puis le traitement par antihistaminique (pour traiter la rhinorrhée les éternuements ou le prurit) par voie orale ou par voie nasale. Les corticoïdes nasaux sont recommandés seuls ou en association avec des anti-H1.   Quelle est la place de l’immunothérapie allergénique ? L’immunothérapie allergénique est documentée principalement pour les pollens et les acariens, et existe uniquement pour les allergies au chat et au chien. Elle est réalisée après un bilan allergologique soigneux en ayant vérifié l’absence d’autres allergies respiratoires responsables des symptômes. Elle peut être proposée à partir de l’âge de 5 ans lorsque les symptômes persistent malgré une limitation de l’exposition et des traitements symptomatiques. Le traitement est donné sous forme de solution sublinguale en une prise par jour sans nécessité d’être à jeun. La voie sous-cutanée n’est plus commercialisée en France. L’efficacité se mesure sur les symptômes cliniques et doit être effective maximum au bout d’un an sinon l’ITA doit être arrêtée. En cas d’efficacité, l’ITA est poursuivi 3 ans.   Conclusion   En pratique, on retiendra que l’allergie aux animaux domestiques est la 3e allergie après les allergies aux acariens et aux pollens. Le diagnostic est porté devant des signes cliniques d’allergie avec la mise en évidence d’une sensibilisation. L’éviction de l’animal reste l’élément clé, difficile à mettre en pratique, et sera donc souvent remplacée par une limitation au mieux de l’exposition. Les traitements symptomatiques locaux sont à mettre en place et l’immunothérapie allergénique discutée au cas par cas pour les allergiques au chat. Pour en savoir plus : • Dávila I et al. Consensus document on dog and cat allergy. Allergy 2018 ; 73(6) : 1206-22. • Kopp MV et al. S3 guideline Allergy Prevention. Allergol Select 2022 ; 6 : 61-97. • Ji X et al. The relationship of domestic pet ownership with the risk of childhood asthma: A systematic review and metaanalysis. Front Pediatr 2022 ; 10 : 953330. • Wenden EJ et al. The relationship between dog ownership, dog play, family dog walking, and pre-schooler social-emotional development: findings from the PLAYCE observational study. Pediatr Res 2021 ; 89(4) : 1013-9. • Brozek JL et al. Allergic Rhinitis and its Impact on Asthma (ARIA) guidelines-2016 revision. J Allergy Clin Immunol 2017 ; 140(4) : 950-8. • Kalayci O et al. The role of environmental allergen control in the management of asthma. World Allergy Organ J 2022 ; 15(3) : 100634. • Sartore S et al. Polymorphism Analysis of Ch1 and Ch2 Genes in the Siberian Cat. Vet Sci 2017 ; 4(4) : 63.

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